Les Imazighens, qui sont-ils et que veulent-ils ?
Origine
Les Berbères, auto-nommé Amazigh, pluriel Imazighens, descendants des habitants pré-arabes d’Afrique du Nord vivent en communautés dispersées à travers le Maroc, l’Algérie, la Tunisie, la Libye, l’Égypte, les Iles Canaries le Mali, le Niger et la Mauritanie. Ils parlent plusieurs dialectes de la langue amazighe appartenant à la famille afro-asiatique apparentée à l’ancien égyptien.[i] Les populations ancestrales des Berbères sont présentes dans la région depuis le Paléolithique supérieur. En effet, d’après l’“histoire génétique de l’Afrique du Nord – Genetic history of North Africa“ : [ii]
“Bien que l’Afrique du Nord a connu flux de gènes des régions environnantes, il a aussi connu de longues périodes d’isolement génétique, ce qui permet un « marqueur berbère » génétique caractéristique d’évoluer dans les autochtones berbères. Aujourd’hui, ce « marqueur berbère » génétique est toujours trouvé dans les régions et les populations encore parlant principalement les langues berbères, ainsi que dans les îles Canaries, qui était habitée par les Berbères autochtones et par leurs descendants à ce jour. Une étude génétique récente a montré que les Nord – Africains sont génétiquement similaires à Paléolithique Nord – Africains. “
Toutefois, les origines des Berbères ne sont pas claires ; plusieurs vagues de personnes, certaines venant d’Europe occidentale, d’autres d’Afrique subsaharienne et d’autres encore d’Afrique du Nord-Est, se sont finalement installées en Afrique du Nord et ont constitué sa population indigène.[iii]
Les premières preuves que nous avons des Berbères montrent qu’ils descendent de tribus de l’âge de pierre qui vivaient sur la côte de l’Afrique du Nord aux alentours de 5 000 ans avant Jésus-Christ. En se mêlant, ces tribus de personnes unies par des langues similaires ont établi une identité commune qui est devenue la base de la culture berbère d’aujourd’hui.
Le mot « berbère » lui-même vient probablement du terme égyptien pour « étranger », qui a été adopté par le Grec pour devenir « barbari« , qui s’est transformé en mot occidental « barbare« . Ce terme désignait avant tout les “gens dont on ne comprend pas la langue“, c’est-à-dire les étrangers. Par extension, le mot a signifié “sauvage“ ou “non-civilisé“. Les Grecs ont utilisé ce mot comme les Égyptiens, comme un terme général pour les étrangers, mais les Berbères se désignaient eux-mêmes comme les « Imazighens » ou « hommes libres« .
On trouve des Berbères dans plusieurs pays du nord de l’Afrique, mais aussi en Égypte et aux îles Canaries, dans des pays du Sahel, entre autres : Mauritanie, Mali et Niger, sans oublier les pays d’accueil que sont la France, les États-Unis, le Canada, etc. En fait, les berbérophones sont présents dans une douzaine de pays couvrant près de cinq millions de kilomètres carrés et comptant près de 40 millions de locuteurs. Toutefois, en raison de l’absence de recensements linguistiques fiables, il est difficile d’évaluer le nombre exact des locuteurs des langues berbères pour chacun des pays.
Pays | Maroc | Algérie | Tunisie | Libye | Niger | Mauritanie | Mali |
Appellation | amazigh | kabyle | Amazigh | tamacheq | Amazigh | zenaga | tamajeq – kidal |
Variétés linguistiques | tachelhit, tamazight, tarifit, ghomara | kabyle, chaouia, tamazight, hassaniyya, tumzabt, taznatit | chaouia, nafusi, sened, ghadamès | nafusi, tamahaq, ghadamès, sawknah, awjilah | tamajaq, tayart, touareg | zenaga | tamajaq, tamasheq |
Population | 24 millions | 14 millions | 100 000 | 220 000 (env.) | 720 000 | 200 | 440 000 (env.) |
Les Berbères ont interagi avec d’autres grandes civilisations de la région nord-africaine pendant des siècles. En particulier, ils ont été soumis par les Phéniciens et les Carthaginois – deux puissantes civilisations méditerranéennes – ainsi que par divers royaumes arabes. À d’autres moments, ils ont établi de puissants royaumes qui se sont disputés le contrôle de l’Afrique du Nord, comme la Numidie.[iv]
En fait, la Numidie est restée un acteur régional majeur jusqu’au premier siècle avant Jésus-Christ, lorsqu’elle est devenue un état client de Rome. Après la chute de Rome, les royaumes berbères ont repris le contrôle d’une grande partie de l’Afrique du Nord-Ouest. Les sultanats berbères en sont même venus à dominer certaines parties de l’Espagne.
Tout au long de cette période, les Berbères ont reçu de nouvelles influences culturelles des terres qu’ils gouvernaient et des personnes qui les dirigeaient. Pourtant, ils ont réussi à conserver un mode de vie particulier qui a fait d’eux l’un des peuples uniques de l’histoire.
Les Berbères sont entrés dans l’histoire du Maroc vers la fin du deuxième millénaire avant J.-C., lorsqu’ils ont établi un premier contact avec les habitants des oasis de la steppe qui étaient peut-être les vestiges des premiers peuples de la savane. Les commerçants phéniciens, qui avaient pénétré dans la Méditerranée occidentale avant le 12ème siècle avant J.-C., ont installé des dépôts de sel et de minerai le long de la côte et le long des rivières du territoire qui est aujourd’hui le Maroc. Plus tard, Carthage a développé des relations commerciales avec les tribus berbères de l’intérieur et leur a versé un tribut annuel pour assurer leur coopération dans l’exploitation des matières premières.
Sur ce point, Reed Wester-Ebbinghaus écrit dans Ancient History Encyclopedia :[v]
“Les Berbères ont occupé l’Afrique du Nord, plus précisément le Maghreb, depuis le début de l’histoire et jusqu’aux conquêtes islamiques du VIIIe siècle de notre ère, ils constituaient le groupe ethnique dominant dans la région saharienne. Les locuteurs et praticiens culturels berbères modernes sont une minorité en Afrique du Nord, bien que les groupes berbères soient considérés comme les descendants des habitants préarabes de la région. Dans la plupart des textes classiques, ils sont appelés « Libyens ». Les Berbères anciens, un groupe ethnique diversifié et largement distribué, parlaient un sous-ensemble de langues afro-asiatiques, linguistiquement apparentées à celles des Égyptiens, des Koushites, des Arabes, des Syriens, des tribus levantines et des Somaliens. Connus sous le nom d’Amazigh, les Berbères tirent leur nom plus courant du latin barbarus (barbare), un effort romain pour distinguer les sociétés tribales moins développées d’une grande partie de l’Europe et de l’Afrique de leur propre civilisation d’origine hellénique. Libye est un mot grec dérivé d’un titre régional, et le terme en est venu à être utilisé de manière interchangeable avec le concept d’Afrique. “
Les inscriptions trouvées en Égypte et datant de l’Ancien Empire (vers 2700-2200 av. J.-C.) sont les plus anciens témoignages connus de la migration berbère et également les plus anciens documents écrits de l’histoire libyenne. Dès cette période, des tribus berbères gênantes, dont l’une est identifiée dans les archives égyptiennes comme étant les Levus (ou « Libyens »), faisaient des raids vers l’est jusqu’au delta du Nil et tentaient de s’y installer. Au cours du Moyen Empire (vers 2200-1700 avant J.-C.), les pharaons égyptiens réussirent à imposer leur suprématie à ces Berbères de l’Est et leur extorquèrent un tribut. De nombreux Berbères ont servi dans l’armée des pharaons, et certains ont atteint des positions importantes dans l’état égyptien. Un de ces officiers berbères prit le contrôle de l’Égypte vers 950 avant J.-C. et, comme Sheshonq I,[vi] et gouverna en tant que pharaon.[vii] On pense que ses successeurs des vingt-deuxième et vingt-troisième dynasties – les dynasties dites libyennes (vers 945-730 av. J.-C.) – étaient également des Berbères.
Le nom Libye est dérivé du nom par lequel une seule tribu berbère était connue des anciens Égyptiens, le nom Libye a ensuite été appliqué par les Grecs à la plus grande partie de l’Afrique du Nord et le terme Libyen à tous ses habitants berbères. Bien que d’origine ancienne, ces noms n’ont pas été utilisés pour désigner le territoire spécifique de la Libye moderne et de son peuple avant le 20ème siècle, et toute la région n’a d’ailleurs pas été constituée en une unité politique cohérente jusqu’à cette époque. Par conséquent, malgré la longue et distincte histoire de ses régions, la Libye moderne doit être considérée comme un nouveau pays, dont la conscience et les institutions nationales sont encore en développement.
Les tribus berbères à la réputation guerrière ont résisté à l’expansion de la colonisation carthaginoise et romaine avant l’ère chrétienne, et elles ont lutté pendant plus d’une génération contre les envahisseurs arabes du 7ème siècle qui ont répandu l’Islam en Afrique du Nord par des conquêtes militaires.
Les Berbères ont une longue et ancienne histoire, dont une grande partie a été négligée parce que le peuple ancien n’avait pas de langue écrite. Le premier indice de leur histoire a été la découverte de peintures rupestres. En effet, des peintures rupestres nord-africaines vieilles de 12 000 ans ont été découvertes à Tadrart Acacus, en Libye. Nombre de ces peintures représentent des activités agricoles et des animaux domestiques. Des peintures ont également été trouvées au Tassili n’Ajjer, dans le sud-est de l’Algérie.
À partir de 2000 avant J.-C. environ, les langues berbères se sont répandues vers l’ouest, de la vallée du Nil jusqu’au Maghreb, en passant par le nord du Sahara. Au premier millénaire avant Jésus-Christ, leurs locuteurs étaient les habitants natifs de la vaste région rencontrée par les Grecs, les Carthaginois et les Romains. Une série de peuples berbères – Mauri, Masaesyli, Massyli, Musulami, Gaetuli, Garamantes – ont ensuite donné naissance à des royaumes berbères sous influence carthaginoise et romaine. Parmi ces royaumes, la Numidie et la Mauritanie ont été officiellement incorporées à l’Empire romain à la fin du 2ème siècle avant J.-C., mais d’autres sont apparus à la fin de l’Antiquité à la suite de l’invasion vandale de 429 après J.-C. et de la reconquête byzantine (533 après J.-C.) pour être supprimés par les conquêtes arabes des 7ème et 8ème siècles après J.-C.
On peut, d’ores et déjà, distinguer deux principales cultures berbères : celle du nord (Méditerranée) et celle du sud (Sahara et Sahel). Les Berbères du nord on peut les appeler Imazighens et ceux du sud Touaregs. Les Imazighens sont surtout sédentaires avec une minorité nomade et les Touaregs sont surtout nomades. Les Imazighens on les trouve de la vallée de Siwa en Egypte jusqu’aux Iles Canaries en passant par la Libye, la Tunisie, l’Algérie et le Maroc. Les Touaregs au Mali, Niger et une infime partie au Burkina Faso.
Toutefois, il faut signaler que pour certains intellectuels panarabes, comme Ramzi Rouighi,[viii] professeur des études sur le Moyen Orient et l’histoire à Southern California University, les Imazighens n’ont jamais existés, ils sont une pure invention du colonialisme européen pour contrer les Arabes et justifier leur acte. Une contradiction majeure dans son argument est qu’il ne rejette pas l’existence du grand ouvrage d’Ibn Khaldoun (mort en 1404), Kitâb al Ibar dont le troisième livre fournit l’histoire des Berbères et des dynasties qui ont régné dans la Maghreb au 15ème siècle. Traduit en français en 1858, le livre a servi, selon Rouighi, à établir une conception ethnique de l’indigénat berbère pour les puissances coloniales françaises qui ont érigé une opposition fondamentale entre les deux groupes (Arabes et Berbères) censés constituer les populations indigènes d’Afrique du Nord. Toutefois, Rouighi oublie que les Arabes de souche n’ont jamais étaient indigènes de cette région, ils sont venus en envahisseurs militaires lors de la conquête islamique au 7ème siecle.
L’ouvrage, en question, est présenté par son éditeur dans les termes suivants :[ix]
“Avant la conquête de l’Afrique du Nord-Ouest par les Arabes au 7ème siècle, affirme Ramzi Rouighi, il n’y avait pas de Berbères. Il y avait des Maures (Mauri), des Mauretaniens, des Africains et de nombreuses tribus et fédérations tribales comme les Leuathae ou les Musulami ; et avant les Arabes, personne ne pensait que ces groupes partageaient une ascendance, une culture ou une langue commune. Certes, il y avait des groupes considérés comme barbares par les Romains, mais « Barbare », ou son équivalent, « Berbère », n’était pas un ethnonyme, et n’était pas exclusif à l’Afrique du Nord. Pourtant, il est courant aujourd’hui de voir des études sur la christianisation ou la romanisation des Berbères, ou sur leur résistance aux conquérants étrangers comme les Carthaginois, les Vandales ou les Arabes. Les archéologues et les linguistes décrivent couramment des groupes et des langues proto-berbères dans des temps encore plus anciens, tandis que les biologistes recherchent des marqueurs d’ADN berbères qui remontent à des milliers d’années. En prenant comme point de départ l’omniprésence de ces anachronismes, “Inventing the Berbers“ examine l’émergence des Berbères en tant que catégorie distincte dans les premiers textes arabes et sonde les façons dont les sources arabes ultérieures, façonnées par les événements contemporains, ont imaginé les Berbères comme un peuple et le Maghreb comme leur foyer. “
Dans le même train de pensée, le même intellectuel panarabe, exprime à haute voix son idéologie soutenue par la majorité des Arabes qui nient l’existence d’autres ethnies dans le monde arabe politique et non géographique :[x]
“Les Européens, qui s’accrochaient au nom de « Moor » pour désigner leur peuple, appelaient le pays « Barbary », un mot qui, selon eux, n’avait rien à voir avec les Berbères. Pendant quelques décennies au 19ème siècle, les Français ont commencé à essayer de régler tout cela et à concevoir une nouvelle façon de représenter les habitants, une façon qui a adapté les nomenclatures indigènes au projet de colonialisme français en Algérie. Ce faisant, la Barbarie a cédé la place à l’Afrique du Nord, les Arabes sont devenus des Sémites orientaux, et les Berbères sont devenus une race blanche – ou du moins non noire – et les véritables habitants indigènes (indigènes, autochtones) de l’Afrique du Nord.
Aujourd’hui, le nom accepté pour tous les Berbères, de l’est de l’Égypte à l’Atlantique, est Imazighen (singulier : Amazigh, prononcé /ʔa.maːˈziːʁ/), le nom d’une tribu du centre du Maroc. Contrairement au berbère, qui évoque un « barbare », ce nom est généralement accompagné de l’explication fantaisiste mais évocatrice qu’il s’agit d’une traduction d' »hommes libres“. “
Par contre, pour Ethnologue[xi], revue scientifique internationale, les Berbères sont une réalité linguistique, ethnographique et anthropologique de l’Afrique du Nord et du Sahel et classe ainsi les langues berbères dans la famille afro-asiatique (chamito-sémitique) comme suit:
1 | Groupe de l’Est (3 langues) – awjila-sokna : awjila (Libye) et sawknah (Libye) – siwa : siwi (Égypte) |
2 | Groupe du Nord (17 langues) – Atlas : judéo-berbère (Israël), tachelhit (Maroc) et tamazight (Maroc) – Kabyle (Algérie) – Zenati Est : ghadamès (Libye), sened (Tunisie) et nafusi (Libye) Ghomara : ghomara (Maroc) Mzab-Wargla : tagargrent (Algérie), tamazight (Algérei), taznatit (Algérei) et tumzabt (Algérie) – Riff : senhaja de Srair (Maroc) et tarifit (Maroc) – Shawiya : tachawit (Algérie) – Tidikelt : tamazight et tidikelt (Algérie) – Chenoua : chaouia (Algérie) |
3 | Groupe tamasheq (4 langues) – Nord : tamahaq et tahaggart (Algérie) – Sud : tamajaq et tawallammat (Niger) tamajeq et tayart (Niger) tamasheq (Mali) |
4 | Zenaga (1 langue) : zenaga (Mauritanie) |
Histoire
La période libyenne : à l’époque préhistorique, l’Afrique du Nord était peuplée par les Libyens à l’ouest du Nil. Les Égyptiens mentionnent les Libyens au 12ème siècle avant J.-C. Le temple du pharaon Sethi Ier, père de Ramsès II, présente 4 Libyens en costume. Les Grecs, dans leurs écrits d’histoire, parlent également des populations libyennes. A l’époque, la Libye ancienne avait des échanges avec les Grecs, les Phéniciens et les Egyptiens.
La période phénicienne : vers 1200 av. J.-C., une accalmie dans les affrontements entre les empires égyptien et hittite permet à la Phénicie de prendre son autonomie. Situées dans la région de l’actuel Liban/Syrie, les populations phéniciennes ont développé de nombreux comptoirs commerciaux dans et autour de la Méditerranée. Grands navigateurs, bons commerçants et artisans, les Phéniciens ont développé un réseau commercial très étendu. Ainsi, Tingis (Tanger), et Carthage sont devenues deux villes-comptoirs importantes dans leur réseau commercial de la Méditerranée.
L’ère punique : Les Phéniciens s’installent également de façon permanente dans les comptoirs, pour créer des cités, comme dans le cas de Carthage, « Qart Hadasht » en punique. Carthage, en Tunisie, qui était devenue très puissante, allait prendre le dessus sur ses concurrents. On parle alors de la civilisation carthaginoise. La civilisation carthaginoise ou « punique » a été fondée par les Phéniciens en 814 avant J.-C., dans le nord de la Tunisie. Les Berbères, un peuple indigène, participent avec les colons phéniciens à l’influence de la civilisation carthaginoise. Cette ville va prendre une importance majeure et générer la création de comptoirs commerciaux sur les rives de la Méditerranée. Les traités commerciaux, en 509 et 348 av. J.-C., mentionnent l’exclusivité du commerce de Carthage avec l’Afrique du Nord et l’absence de pillage.
Les guerres puniques : mais des tensions avec l’Empire romain apparaissent. La Sicile devient un enjeu et fait l’objet d’une confrontation. Cela conduit à la 1ère guerre punique, essentiellement navale, qui dure 23 ans, à partir de 261 av. J.-C. Carthage doit payer un lourd tribut à Rome. La 2ème guerre punique met en scène Scipion l’Africain, le proconsul romain, qui, depuis l’Hispanie, part à la conquête de Carthage, qu’il évitera en 209 av. J.-C. La 3ème guerre punique, de 149 av. J.-C. à 146 av. J.-C., répond à la volonté de Rome d’exterminer Carthage, qui sera complètement détruite. Cela conduit à la suprématie de Rome sur tout le bassin méditerranéen et l’Ifriqiya. Mais la civilisation de l’Afrique punique persiste tant sur le plan linguistique que religieux.
Royaume berbère numide : sur les restes de l’empire carthaginois est construit le royaume berbère numide. Il correspond à une partie de l’Algérie, de la Tunisie, du Maroc et de la Libye.[xii] L’âge d’or de la Numidie est établi en 205 avant J.-C. lorsque Massinissa, roi berbère numide (238 avant J.-C/-148 avant J.-C), allié des Romains et adversaire de Carthage, unifie les territoires lors de la 2ème guerre punique. Massinissa réussit à préserver l’indépendance de son territoire, tout en permettant son développement économique avec l’agriculture et l’élevage, et en frappant des pièces de monnaie.
Après lui, ses descendants se sont divisés puis ont tenté de réunifier la Numidie. Les Romains ne voyaient pas d’un bon œil un tel développement. Mais Jugurtha, le petit-fils berbère de Massinissa, arriva à vaincre l’armée romaine en 110 avant J.-C. Incapables de gagner sur le plan militaire, les Romains utiliseront un subterfuge pour capturer Jugurtha. Son beau-frère Bocchus le livrera aux Romains en 105 avant J.-C., en échange de quoi Bocchus devient roi de Mauritanie. Il reconquiert la partie occidentale de la Numidie. Celle-ci comprend ce qui est le Maroc actuel, à l’époque le pays de Massaesyles. La partie orientale reste sous le contrôle des Romains.
La conquête romaine : après avoir envoyé des colonies sous l’empereur Auguste, les Romains sont entrés au Maghreb au début de notre ère, en 44 après J.-C. Ils ont créé, sous l’empereur romain Claude, au 1er siècle, 3 provinces romaines dont la plus occidentale, la Mauritanie tingitane (Tanger), correspondant au nord du Maroc. Volubilis, avec ses 30 000 habitants, et Tingis (Tanger) sont des villes importantes. Les indigènes sont d’origine berbère et sont appelés par les Romains les Mauris, plus connus, plus tard, sous le nom de Maures. Les Berbères peuvent obtenir la nationalité romaine, ce qui a permis leur assimilation. Des mariages mixtes existent entre Berbères et Romains. Des fresques romaines dépeignent la vie des Berbères. Dans la société civile : les amphithéâtres et les bains romains sont accessibles aux Berbères. Les jeux romains sont également une distraction pour les Berbères.
Rome et Byzance : au 3ème siècle de notre ère, la Mauritanie Tingitane était rattachée au diocèse d’Espagne, tandis que les autres provinces romaines du Maghreb oriental, la Mauritanie césarienne et la Mauritanie setifiane (ou Prima ou même l’Afrique proconsulaire), étaient rattachées au diocèse d’Afrique, situé à Carthage. Les crises politiques ont conduit à l’affaiblissement de l’Empire romain. Les Berbères, exacerbées par la pression fiscale et la christianisation, se révoltèrent au Maghreb.
L’Empire romain est divisé en 285 après J.-C. entre l’Empire romain d’Occident et l’Empire romain d’Orient par Dioclétien. En 330, Byzance devient la « nouvelle Rome » et Constantinople, le cœur de l’Empire romain d’Orient.
Les vandales et la chute de l’empire romain : en 429, quelques 80 000 vandales ont traversé le détroit de Gibraltar et ont envahi la Mauritanie. Les Maures, de 15 à 20 000 soldats berbères, participent aux pillages et font prisonniers les Romains qu’ils mettent en esclavage. En 455, ils saccagent la ville de Rome pour la deuxième fois, après les Wisigoths en 410 et avant les Ostrogoths en 546.
En 476, l’Empire romain d’Occident disparaît et la dynastie des Vandales disparaît également lorsque l’Empire byzantin ou Empire romain d’Orient, sous Justinien Ier, envoie une expédition maritime de Constantinople qui débarque à Carthage en Tunisie et annexe le royaume barbare des Vandales en Afrique du Nord en 533.
Vers 600 après J.-C., l’empire romano-byzantin est à son apogée territoriale, mais de nouvelles menaces apparaissent. Les guerres avec la dynastie sassanide de l’Empire perse entre 602 et 628 vont faire reculer l’Empire byzantin et l’affaiblir. Cela permet aux Arabes de commencer leurs conquêtes islamiques par le Jihad pour contrer l’expansion du christianisme.
Califat omeyyade de Damas : à la mort du prophète Mohammed, en 632 après J.-C., c’est-à-dire l’an 10 de l’Hégire, une seule religion, l’Islam a été implantée dans toute la péninsule arabique (l’actuelle Arabie Saoudite). Avec la guerre contre la Perse à partir de 636 et contre l’Empire byzantin, l’Islam s’est répandu en Irak et en Iran à l’est mais aussi à l’ouest en Palestine, en Syrie et en Egypte en 648.
Lors d’une 2ème invasion, en 670, quelques 10 000 cavaliers arabes entrent en Ifriqiya amazighe. Ils étaient dirigés par le gouverneur Oqba Ibn Nafi, le général chargé de la conquête du Maghreb. Ils fondent la ville de Kairouan en Tunisie, afin d’avoir un avant-poste omeyyade en Ifriqiya. En moins d’un demi-siècle, les Arabes ont atteint le Maroc et la côte atlantique vers 682. Mais le corps expéditionnaire des Arabes omeyyades s’est heurté à des tribus berbères alliées aux Byzantins. Oqba meurt en 683 lors d’une embuscade tendue par la Kahina « la devineresse »,[xiii] la reine guerrière berbère. Kairouan est reprise.
Dynasties berbères
Le Maroc a connu sa période d’or du 11ème au milieu du 15ème siècle sous les dynasties berbères : les Almoravides, les Almohades et les Mérinides. Les Berbères étaient des guerriers célèbres. Aucune des dynasties musulmanes ou des puissances coloniales n’a jamais pu soumettre et absorber les clans berbères dans les régions montagneuses. Les dernières dynasties – les Almoravides, les Almohades, les Mérinides, les Wattasides, les Saadiens et les Alaouites toujours en place – ont déplacé la capitale de Fès à Marrakech, Meknès et Rabat.
Les Almoravides (1056-1147) sont un groupe berbère qui a émergé dans les déserts du sud du Maroc et de la Mauritanie. Le mouvement almoravide (« ceux qui ont fait une retraite religieuse ») s’est développé au début du 11ème siècle chez les Berbères Sanhaja du Sahara occidental. Ils ont adopté une forme puritaine d’islam et étaient populaires parmi les dépossédés dans les campagnes et le désert. En peu de temps, ils sont devenus puissants.
L’impulsion initiale du mouvement almoravide était religieuse, une tentative d’un chef de tribu pour imposer une discipline morale et une stricte adhésion aux principes islamiques à ses adeptes. Mais le mouvement almoravide s’est tourné vers la conquête militaire après 1054. En 1106, les Almoravides avaient conquis le Maroc, le Maghreb jusqu’à Alger à l’est et l’Espagne jusqu’à l’Ebre.
Suite à une grande incursion des bédouins arabes d’Égypte à partir de la première moitié du 11ème siècle, l’usage de l’arabe s’est répandu dans les campagnes, et les Berbères sédentaires ont été progressivement arabisés.
Les Almohades (1130-1269) ont déplacé les Almoravides après avoir capturé les routes commerciales stratégiques de Sijilmasa. Ils comptaient sur le soutien des Berbères dans les montagnes de l’Atlas. Les Almohades ont pris le contrôle du Maroc en 1146, ont capturé Alger vers 1151 et, en 1160, ont achevé la conquête du Maghreb central. Le zénith du pouvoir almohade se situe entre 1163 et 1199. Leur empire, dans sa plus grande étendue, comprenait le Maroc, l’Algérie, la Tunisie et la partie musulmane de l’Espagne.
Comme les Almoravides, les Almohades (« unitariens ») ont trouvé leur inspiration dans la réforme islamique. Les Almohades ont pris le contrôle du Maroc en 1146, ont capturé Alger vers 1151 et, en 1160, ils ont achevé la conquête du Maghreb central. Pour la première fois, les Maghrébins étaient unis sous un régime local, mais les guerres continuelles en Espagne ont surchargé les ressources des Almohades, et dans le Maghreb, leur position a été compromise par des conflits entre factions et un renouvellement des guerres tribales.
Bien qu’il s’est déclaré mahdî, imâm et ma’sûm (chef infaillible envoyé par Dieu), Mohammad ibn Abdallah ibn Tumart a consulté un conseil de dix de ses plus anciens disciples (le fameux ait rab’în amazigh).[xiv] Influencé par la tradition berbère de gouvernement représentatif, il y ajouta plus tard une assemblée composée de cinquante chefs de différentes tribus. La rébellion almohade a commencé en 1125 par des attaques contre des villes marocaines, dont Sous et Marrakech.
Les Almohades ont été affaiblis par leur incapacité à créer un sentiment d’appartenance à un état parmi les tribus berbères en guerre et par les incursions des armées chrétiennes dans le nord et des armées bédouines rivales au Maroc. Ils ont été contraints de diviser leur administration. Après avoir été vaincus par les chrétiens à Las Nevas de Tolosa en Espagne, leur empire s’est effondré.
Les Zayanides : dans le Maghreb central, les Zayanides ont fondé une dynastie à Tlemcen en Algérie. Pendant plus de 300 ans, jusqu’à ce que la région passe sous la suzeraineté ottomane au 16ème siècle, les Zayanides ont maintenu une emprise forte dans le Maghreb central. De nombreuses villes côtières ont affirmé leur autonomie en tant que républiques municipales gouvernées par des oligarchies marchandes, des chefs de tribus des campagnes environnantes ou des corsaires qui opéraient à partir de leurs ports. Néanmoins, Tlemcen, la « perle du Maghreb », a prospéré en tant que centre commercial.
Traits spécifiques des Amazighs
L’anthropologue américain Carleton S. Coon qui a entrepris une étude approfondie des Imazighens du Rif (Tribes of the Rif) dans les années 20 du siècle dernier, les a appelés les “Tribus blanches de l’Afrique“ vu qu’elles avaient des traits européens : forme du visage et du nez, teint clair, cheveux blonds, yeux verts et bleus, et taches de rousseur.[xv]
L’habitation berbère abrite la famille nucléaire dhaghagharth/kanoun, généralement patrilinéaire, qui est l’unité de base d’un groupe tribal allant sous le nom d’un ancêtre commun, les Ait. En principe, toutes les familles et tous les clans sont égaux, régis par des codes d’honneur susceptibles de donner lieu à des querelles mais aussi par un conseil des anciens, la jmāʿah ou jma’ath (entité politique élue démocratiquement), qui maintenait la paix par des jugements, des décisions sur les compensations et la détermination des punitions.
Ahmed Boudou définit cette institution démocratique amazighe dans les termes suivants :[xvi]
“Le ljmaàt ou l’anfalis font partie des institutions qui ont toujours joué un rôle prépondérant dans le maintien des équilibres au sein de la société ; il désigne un mini-conseil composé des représentants des familles. Son rôle est de coordonner et contrôler les activités au sein du village. Il s’agit donc d’une institution traditionnelle administrative, sociale et économique. Il veille au bon fonctionnement des différentes structures et est juridiquement encadré par des lois coutumières azerf. Les membres de la tribu amazighe se réunissent afin de nommer les représentants de ce mini-conseil, appelé inflas ou ayt rbàin. Ils forment ainsi le tajmaàt n taqbilt (conseil de la tribu), un comité représentant la tribu, composé des amaghar : amghar d iyer, d’agdal, de tawiza et de tawala. “
Un conseil dont les prérogatives sont comme suit :
“Après la composition du tajmaàt, celui-ci doit accomplir plusieurs missions. Il doit gérer toute une série d’institutions et systèmes, généralement d’ordre social et économique au détriment de ce qui est politique puisqu’il ne dispose pas d’un pouvoir politique, car c’est l’amghar (le maire) qui s’en occupe. Ces attributions concernent les domaines :
– législatif : la djemâa élabore, adapte et, au besoin, rectifie les dispositions du droit coutumier.
– exécutif : elle veille à l’application de ce droit et, à ce titre, elle assure les fonctions de police locale Elle se charge également de la collecte et de la gestion des amendes versées en cas d’infraction. Ces amendes servent aux dépenses collectives : travaux d’entretien du village, frais d’hospitalité et sacrifice d’automne. “
En fait, les différentes sociétés amazighes étaient démocratiques mais pas égalitaires. Le village et le clan admettaient régulièrement les nouveaux venus comme des inférieurs, et les anciens au pouvoir étaient issus de familles dirigeantes. Si des villages ou des clans partaient en guerre, comme c’était souvent le cas, on choisissait un chef qui, grâce à ses prouesses, pouvait attirer des clients, former sa propre armée comme les seigneurs du Haut Atlas vers 1900.
Les Touaregs de l’Ahaggar et du sud du Sahara, également appelés « hommes bleus » en raison de leurs robes et de leurs voiles de visage teints à l’indigo, étaient des nomades aristocrates qui régnaient sur des vassaux, des serfs et des esclaves qui cultivaient les oasis en leur nom ; ils reconnaissaient à leur tour des chefs suprêmes ou des rois, qu’on appelait amenukals.
Les Touaregs avaient conservé une forme de l’ancienne écriture consonantique libyenne sous le nom de Tifinagh par une classe d’érudits musulmans. Ces saints érudits étaient partout des figures d’autorité, et parmi les Berbères Ibadi du Mʾzab ils dirigeaient la communauté.
Le Tifinagh est introduit dans l’Encyclopédie Berbère par H. Claudot-Hawad dans un article intitulé “Ecriture Tifinagh“ comme suit :[xvii]
“Dans la mythologie touarègue, la création de l’écriture tifinagh est attribuée au héros civilisateur appelé Aniguran ou Amamellen*. Les inscriptions rupestres de ces tifinagh anciens sont extrêmement nombreuses. Elles comprennent quelques caractères qui ne sont plus en usage aujourd’hui. L’orientation des lettres détermine le sens à adopter pour la lecture qui peut suivre tous les cas de figure, serpentant de gauche à droite, de haut en bas, de bas en haut, linéaire ou spiralée. Il est possible de déchiffrer et d’épeler la majorité des mots tracés bien que leurs sens puissent échapper aux lecteurs d’aujourd’hui. Les déclarations commencent souvent par nek, « moi… ».
D’une manière générale, cet alphabet ancien dont le témoignage rupestre est présent dans tout le pays touareg et se retrouve jusqu’à la falaise de Tegedit, à cent kilomètres au sud de l’Ayr, est considéré comme très proche des tifinaghs actuels de l’Ahaggar et de l’Ajjer, parenté instaurant dans le passé un trait d’union entre les différentes confédérations qui ne se seraient particularisées ou diversifiées que plus tard“.
Trinité culturelle amazighe
Il y a spécifiquement et exclusivement trois thèmes principaux dans la culture amazighe qui sont définis comme une trinité importante et primordiale dans son système des valeurs et sont facilement identifiables dans la culture nord-africaine d’aujourd’hui. Ces thèmes ont transcendé la culture amazighe et ont été largement acceptés comme des concepts de base de l’identité.
La trinité en question s’articule autour des notions suivantes :
- L’importance de la langue comme véhicule de la culture et marqueur principal de l’identité (tamazight/awal) sur à la fois le plan de la communication et de la perpétuation de l’histoire ;
- L’omniprésence du système fort et indivisible de la parenté et de l‘appartenance à la famille étendue (ddam/tamount) qui s’exprime par la solidarité et la coexistence, et-
- La forte connexion à la terre et l’identification avec ces bienfaits et la croyance en sa sacralité (akkal/tammourt/tamazirt) qui est forte aussi chez d’autres peuplades du pourtour méditerranéen.[xviii]
Le thème le plus évident, qui est présent dans la communauté amazighe, est l’importance de la langue dans la société, la civilisation et le vécu. Quand on contemple la culture du peuple amazigh, il y a une corrélation claire entre la pertinence de la langue et la préservation de la civilisation et des traditions millénaires (voir la tradition des Maitres Musiciens Jahjouka au nord-est du Maroc). Leur musique de transe et leur théâtre anthropologique a traversé quatre mille ans d’histoire sans égratignure aucune.[xix]
L’histoire et le système de croyances du peuple amazigh ont été préservés de façon orale de père en fils ; où une génération transmettait l’histoire, la sagesse et les lois à une autre, de façon automatique par le biais de la langue maternelle, puissant véhicule linguistique.[xx] En réalité, malgré l’existence de différents dialectes amazighes distincts, l’histoire et les lois du peuple amazigh se sont synchronisées et ont survécu à d’innombrables invasions à travers sa longue histoire de huit milléniums.
L’idée d’un état-nation était un concept étranger des envahisseurs de l’Occident que les autochtones Amazighs et Arabes avaient rejeté avec vigueur. Pour les Amazighs comme pour les Arabes, on admet que les similitudes entre les hommes ne sont pas définies par des lignes imaginaires mais plutôt par une identité qui découle d’une langue commune, d’une histoire partagée et, pour les Arabes, d’une religion forte dans sa conception de l’appartenance (oummah).
Cependant, l’idée de parenté qui se manifeste à travers des personnes liées par le sang, le vécu et l’histoire accuse une distinction pertinente entre la culture amazighe dans le sens que le système communautaire amazigh met l’accent sur la notion de la matriarche comme personne-pivot de la famille imprégnée de valeurs démocratiques, alors que la culture nord-africaine, de substrat arabe, préfère une patriarchie, très forte et sans partage.
Chez les Amazighs les liens de sang sont sacrés dans le mariage, dans la paternité et les appartenances familiales. En effet, deux tribus signent leur alliance par un mariage. Le sang dans le contexte du sacrifice et aussi signe de réconciliation, de demande de pardon et de respect, tagharst (tradition sacrificielle).
Pour Marie Virolle, la tradition sacrificielle chez les Amazighs de Kabylie se présente comme suit :[xxi]
“Le « système sacrificiel », tel qu’on peut le dégager de l’observation des rituels en Kabylie – comme sans aucun doute dans l’ensemble du Maghreb rural, et dans bien d’autres régions où le sacrifice animal (voire végétal) est une forme dominante du rituel socio-sacral ou socio-religieux –, fonctionne selon plusieurs « registres », qui présentent parfois des similitudes quant aux sacrifices mis en œuvre et à la symbolique rituelle mais qui répondent à des nécessités différentes, tant sur le plan fonctionnel que sur celui de la réalisation de l’imaginaire collectif. Ces nécessités rituelles sont liées :
– d’une part, à des référents temporels (par exemple calendaires), spatiaux (par exemple de frontières ou de fondation), sociaux (par exemple génériques) ;
– d’autre part à deux notions principales : celle de commencement/charnière (prémices, inauguration, fin/début de cycle) et celle de réparation/restauration/consolidation (du corps individuel, du « corps » social ou collectif…“
Cette tradition est aussi le symbole d’hospitalité, de convivialité, de l’acceptation de l’autre dans sa différence et de la tolérance. On égorge un mouton pour souhaiter la bienvenue à un invité ou un étranger quelconque parce que faire couler du sang c’est établir un lien de respect avec le nouveau venu et l’inclure dans la société amazighe : jma’ath.[xxii]
Les Amazighs considèrent la terre comme un bien sacré qui, non seulement soutenait la vie, mais fournissait une protection contre les campagnes impérialistes occidentales et arabes et contribuaient, aussi, à préserver la langue et le système communautaire. D’ailleurs la vente de tout lopin de terre hérité a été et est toujours une notion fortement stigmatisée (Hchouma) dans la culture amazighe de toujours. L’aspect spirituel/sacré de la terre peut être trouvé, aussi, dans le référentiel de l’Islam nord-africain (étroitement lié au Soufisme et à la spiritualité amazighe), aujourd’hui.
Les Amazighs ont une relation complexe avec la langue, les normes communautaires de la société et la connexion à la terre. La structure sociétale et la relation à la terre sont des référents identitaires de grande valeur dans la culture amazighe d’aujourd’hui.
La civilisation amazighe a survécu à l’usure du temps et des cultures envahissantes grâce à l’amour infini que les autochtones de l’Afrique du Nord portent à la terre qui les nourrit, les protège et les fortifie. N’est-il pas le cas que l’amazighité continue à défier le temps parce que les montagnes (akkal) l’ont protégé contre l’acculturation et l’invasion arabe et européenne.
L’amour des Amazighs pour la terre se manifeste dans l’agriculture et les célébrations de ses dons généreux en été, lors des moussems (pratiques d’origine païenne). Des célébrations de remerciements au bon dieu pour son don de fertilité et sa générosité. Cette célébration on la retrouve des plus belles chez les anciens amazighs des Jbalas du Maroc, en particulier le clan des Ait Serif ou les musiciens les plus anciens de la Méditerranée, Jahjouka, célèbrent la fertilité de la terre en musique et dance durant leur festival annuel connu sous le nom de Boujloud en Arabe et bou irmawen/ilmawen en Tamazight.[xxiii]
Développement de la culture amazighe sous domination étrangère
L’histoire des Berbères vivant aujourd’hui au Maroc, en Tunisie, en Algérie, en Libye et en Égypte, est marquée par la domination des étrangers qu’ils ont subie dans leur pays d’origine – d’abord par les Romains, puis par les Arabes, et plus tard par les Français, Espagnols et les Italiens. « Adaptation et rébellion » – telles étaient les seules options qui s’offraient aux Berbères sous la domination étrangère. En tant qu' »hommes libres », comment le terme « Imazighens » peut être traduit en français, ils ont pour la plupart opté pour la non-adaptation et se sont retirés dans les régions montagneuses pour pratiquer leur culture dans leur famille et échapper aux poursuites des dirigeants étrangers. Les tatouages étaient un des moyens de rébellion. Les signes et les ornements qui décorent le dos des mains des hommes parlent de l’appartenance tribale et de la religion – et ils étaient interdits sous la domination musulmane. Aujourd’hui, les jeunes choisissent d’autres moyens pour exprimer leur identité et lutter contre la discrimination.
Dans ce sens, Marguerite Rollinde écrit:[xxiv]
“On ne peut parler d’un mouvement berbère unifié au Maroc. Il se caractérise par la pluralité dans ses objectifs, ses stratégies, ses représentants. Parti du milieu universitaire, il s’affirme à travers ses artistes, et développe des stratégies associatives qui dépassent, pour certaines, le cadre national, et évoluent parfois en partis politiques.
Le mouvement, au départ, reste confiné dans les milieux universitaires, qui travaillent sur la poésie et les chants populaires. Il y est encore très présent, en particulier à la Faculté de Lettres d’Agadir, où se concurrencent deux courants, les enseignants préconisant un travail sur la langue, tandis que les étudiants veulent agir politiquement au sein de l’UNEM, où ils s’affrontent de plus en plus aux islamistes qui représentent la deuxième tendance majoritaire dans cette université. “
La culture berbère a son art et ses symboles typiques, ainsi que sa musique unique qui assure une continuité à travers l’histoire. L’ancienne culture berbère est extraordinairement riche et diverse, avec une variété de styles musicaux. Ceux-ci vont de la cornemuse et du hautbois : lghita (style celtique) à la musique pentatonique (rappelant la musique chinoise), tous combinés à des rythmes africains et à un stock très important de littérature orale authentique. Ces traditions ont été maintenues en vie par de petits groupes de musiciens imedyazens qui se déplacent de village en village, comme ils le font depuis des siècles, pour animer les mariages et autres occasions sociales avec leurs chansons, leurs contes et leurs poèmes.
Les mères berbères ont été largement responsables de la survie de la langue et de l’identité culturelle berbères. Les mères partagent les histoires et les croyances traditionnelles avec leurs enfants. Les femmes préservent également les traditions culturelles par le biais de l’artisanat, comme la tapisserie, les bijoux, les tatouages et la poterie.[xxv]
Les femmes rurales, en particulier celles qui sont analphabètes, préservent le tamazight comme une langue vivante, en insufflant aux formes d’art traditionnelles une certaine oralité pour transmettre les traditions linguistiques de génération en génération. Dans le domaine de la musique et de la poésie, les femmes amazighes utilisent leurs vers pour tenir la communauté informée des mouvements des différents membres, pour raconter et enregistrer pour l’histoire orale les événements importants de la communauté, pour faire respecter les codes moraux et sociaux, et pour rappeler à la communauté élargie les liens qui les unissent.[xxvi]
Au début des années 2000, les Berbères se sont fait plus entendre dans leurs protestations contre la perte de leur langue et de leur culture. Au Maroc et en Algérie, en particulier en Kabylie, les problèmes étaient traités par le gouvernement. Le Maroc et l’Algérie introduisent tous deux l’enseignement du berbère dans certaines écoles. Dans son rapport de 2007 sur l’Algérie, le Département d’État américain a noté que :[xxvii]
« l’accès à la presse écrite et aux médias audiovisuels pour la culture tamazight et amazighe a continué à se développer. La programmation en tamazight a également augmenté sur les chaînes en langue non berbère, tout comme les publicités en tamazight sur toutes les chaînes de télévision et de radio. À partir de l’année scolaire 2006-2007, la langue tamazight a été officiellement enseignée dans les écoles primaires, à partir de la quatrième année dans 17 provinces à prédominance berbère. »
Evolution de la culture amazighe au Maroc
Aujourd’hui, la plupart des trente-six millions de Marocains sont probablement un mélange de Berbères et d’Arabes. Vous verrez des autocollants « Berber Pride« , des graffitis, des tee-shirts et des chapeaux un peu partout vantant la grandeur de la culture amazighe. Ces dernières années, on a, en effet, assisté à une résurgence de l’extrême fierté de nombreux Marocains pour leur ethnie et leur patrimoine. En fait, en 2014, l’état a levé l’interdiction des noms amazighs, embrassant ainsi ce type de fierté au niveau de l’état même.
Dans l’histoire récente, on pensait que le pays était grossièrement divisé, les Berbères vivant en grande partie dans les chaînes de montagnes du Haut Atlas, du Moyen Atlas et du Rif du Maroc tandis que les Arabes détenaient les villes et les vallées, bien que cette division soit moins évidente de nos jours. Pourtant, les Marocains vivant dans les montagnes s’identifient généralement davantage comme étant « amazighs » alors que dans les villes, les identités sont plus fluides.
Dans certaines régions, l’Occident a faussement caractérisé les Berbères comme étant en grande partie nomades, utilisant des chameaux pour traverser le désert du Sahara. Bien que cela ait été vrai pour un sous-ensemble de tribus, il s’agit d’une sorte de stéréotype qui s’est répandu dans tout le monde berbère. Il faut dire que les Amazighs ont depuis longtemps une influence notoire sur le commerce en établissant des routes commerciales entre l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique subsaharienne. Ils transportaient des marchandises depuis l’extérieur du désert du Sahara jusqu’aux villes du nord du Maroc, notamment Fès et Marrakech. Les routes du désert ont été accomplies par le nerf, la connaissance, l’expérience et le dromadaire, bien sûr. Cependant, au Maroc, la plupart des Berbères étaient des agriculteurs vivant dans les montagnes et les vallées. D’autres encore étaient des commerçants et des boutiquiers.[xxviii] Les marchands étaient considérés comme une classe supérieure aux fermiers, mais au fil des ans, les rôles se sont inversés.
Préserver la culture aujourd’hui est devenu une question de politique. Les organisations de la société civile et les partis politiques amazighs s’efforcent d’obtenir davantage de politiques qui contribueraient à préserver leur culture et leur histoire, comme l’amendement de la constitution marocaine en 2011 pour inclure le tamazight comme langue nationale et officielle.[xxix]
La clé de la préservation de la culture amazighe au Maroc aujourd’hui est l’institutionnalisation. Le patrimoine, l’histoire et la culture populaire des tribus berbères doivent être mis dans un cadre institutionnel par le biais de différentes organisations qui visent à assurer la coexistence dans la diversité. Les demandes croissantes de reconnaissance des Berbères – en théorie comme les premiers habitants de l’Afrique du Nord et en pratique comme des composantes distinctes de sa société – ont rencontré un certain succès
Le berbérisme au Maroc a conduit à la création d’un Institut royal de la culture amazighe –IRCAM-, à l’enseignement du tamazight dans les écoles et enfin, depuis 2011, à la reconnaissance de tamazight comme langue officielle, tout cela dans l’intérêt de l’unité nationale sous la monarchie.[xxx] Parallèlement, la culture berbère donne à la précieuse industrie touristique une grande partie de son cachet : son architecture, son artisanat et ses costumes distinctifs s’inscrivent dans un paysage romantique spécifiquement marocain.
Le tamazight est étudié en Algérie et, depuis 2002, il est reconnu comme une langue nationale et officielle en 2016. Malgré les troubles populaires en Kabylie, les Berbères n’ont pas encore réussi à se forger une identité politique forte dans une démocratie algérienne.
En Libye, le renversement de Mouammar Kadhafi a ouvert la voie aux Berbères du Plateau Nefûsah pour exiger une position reconnue dans le nouvel ordre, mais les Touaregs de l’étranger que Kadhafi avait recrutés dans son armée ont été chassés du pays. Toutefois, le Parlement Libyen (Chambre des représentants) qui siège à Benghazi et Tripoli viennent d’officialiser la langue amazighe le 28 mai 2020, d’après Stéphane Arrami :[xxxi]
“La Libye devient le troisième pays d’Afrique du Nord après le Maroc en 2011 et l’Algérie en 2016 à officialiser la langue mère amazighe (tamazight). La Tunisie est le seul pays à ne pas avoir légiféré sur cette question. Les députés libyens ont voté à la majorité l’adoption de la langue amazighe qui jouira du même statut que la langue arabe sur tout le territoire. “
Mais les observateurs amazighs restent très prudents au sujet de cette décision et de l’avis du responsable d’une association amazighe :[xxxii]
“Une officialisation intervient généralement lors d’une réforme constitutionnelle. La décision parue le 28 mai est véridique, quant à son importance il faut relativiser. Il faut surtout attendre ce que les Amazighs de Libye diront à ce sujet. Par exemple, le Haut conseil des Amazighs de Libye (HCAL) ne s’est pas encore prononcé à ce sujet. Nous ne pouvons pas nous prononcer avant qu’il n’y ait au moins une voix « officielle » des Amazighs de Libye qui le fasse. Vous avez pu aussi remarquer aussi que Tamazgha ne s’est toujours pas prononcée. En revanche, ce qui est quasiment certain, c’est que le Parlement rajoutera tamazight à sa charte graphique et l’ensemble de ses documents officiels porteront un entête tamazight“.
Aussi, selon Rachid Raha, Président de l’ONG Assemblée Mondiale Amazighe :[xxxiii]
“Tamazight n’est pas encore officialisée. Seul le parlement de l’ouest l’a adopté au sein de son Parlement et décidé de l’inclure dans ses documents“.
Par contre, les soldats touaregs de Qaddafi sont retournés dans le sud du Sahara pour relancer, de concert avec les militants islamiques, un conflit de longue date entre leur peuple et les gouvernements du Mali et du Niger au sujet du statut de minorité berbère et pour formuler une nouvelle demande de statut séparé. Bien que l’issue des conflits contemporains reste incertaine, le berbérisme est suffisamment établi en tant qu’idéologie et programme culturel et politique pour fournir aux communautés dispersées de Berbères une nouvelle identité nationale à la place de l’ancienne identité purement anthropologique.
Dans un article intitulé : “Mali: les Touaregs, un peuple dans la tourmente“ publié dansL’Express, Bioris Thiolay présente les Touaregs comme suit :[xxxiv]
“Peuple berbère, les Touaregs vivent dans cinq pays de la bande sahélo-saharienne. Minoritaires, ils sont aujourd’hui marginalisés. Au nord du Mali, outre la présence d’islamistes armés, les civils craignent de subir des représailles de l’armée de Bamako.
Ils se dénomment eux-mêmes avec fierté Kel Taggelmoust, « ceux qui portent le voile », Kel Tamachek, « ceux qui parlent le Tamachek » ou encore Imajeren, les « hommes libres ». Leur long turban teinté d’indigo, qui déteint sur la peau, leur vaut en Occident le surnom d' »hommes bleus ». Mais tout le monde les appelle Touaregs -les « isolés »- terme que les conquérants arabo-musulmans ont attribué, à partir du VIIe siècle, à ce peuple qui préférait se réfugier dans le désert plutôt que se soumettre.
Ils sont aujourd’hui au moins 1,5 million, répartis entre cinq pays : Niger (800 000), Mali (500 000), Libye, Algérie et Burkina-Faso (de 30 000 à 50 000). Les Touaregs, d’origine berbère, sont l’un des derniers peuples sahariens pratiquant l’élevage nomade. Pendant des siècles, ils ont aussi régné, avec les Maures, sur le commerce caravanier transsaharien. Ils opéraient des razzias sur les voyageurs et commerçants traversant leur territoire. Les tribus se regroupaient en un système de confédérations politiques régionales : Kel Ahaggar (ceux du Hoggar, en Algérie), Kel Ajjer, Kel Adar (Mali), Kel Aïr (Niger), etc.“.
Les valeurs portées par la culture amazighe au Maroc
La culture et les traditions au sein de chaque communauté berbère sont très tribales et différentes d’une région à l’autre. La vie quotidienne est nomade, les hommes s’occupant du bétail et les femmes de la famille et de l’artisanat. La communauté se déplace pour s’assurer que le bétail dispose de suffisamment de pâturages, d’eau et d’abris. Cela permet aux femmes de récolter continuellement différentes plantes qu’elles utiliseront pour teindre la laine et le coton. Leur bétail leur fournit de la laine qu’elles utilisent pour tisser des kilims.
Ces tapis sont parfois fabriqués pour un usage personnel mais sont aussi souvent vendus dans les souks (marchés) locaux. Les motifs tissés dans les kilims sont distinctifs et caractéristiques de la tribu et de la région. Les femmes berbères marocaines aiment embellir leurs kilims avec des franges et des paillettes alors que d’autres tisserands berbères de différentes régions utiliseront simplement des motifs géométriques tels que des diamants et des triangles.[xxxv] L’art berbère est principalement artisanal et s’exprime sous forme de pièces portables ou utilisables, comme la poterie, les meubles, les tissus, les bijoux ou les tapis. La conception artistique est également représentée dans leur architecture.
La musique de village est jouée à l’aide de flûtes et de tambours ; le rythme est souvent accompagné par des groupes de danseurs. Les hommes et les femmes y participent, bien que dans certaines régions, seuls les hommes soient autorisés à danser.[xxxvi] Cette musique est rarement entendue dans les villes. La musique rituelle est jouée lors de cérémonies telles que les mariages. Elle est également jouée pour éloigner les mauvais esprits et guérir les malades.
L’une des danses amazighes la plus connue et la plus appréciée au Maroc est, indéniablement Ahwâch. Elle est introduite par les chercheurs académiques Mohamed Elmedlaoui, lui-même amazigh,et Sigal Azeryahun, dans les termes suivants :[xxxvii]
“Le terme aḥwash fait référence à plusieurs variétés locales d’une danse collective rurale berbère dans laquelle les participants chantent tout en dansant. Cet idiome de la poésie chantée se trouve dans les montagnes de l’Atlas marocain et dans les régions environnantes.
Il se compose d’éléments musicaux, poétiques, chorégraphiques et comportementaux, qui sont typiques de la culture berbère au Maroc. Selon les sous-genres et/ou les localités, aḥwash la danse chantée est exécutée par des hommes et/ou des femmes, ensemble ou séparément, devant un public toujours mixte. L’événement se déroule en plein air, sur la place du forum du village, la plupart du temps en été ; ainsi, il sera entendu partout dans les environs, surtout que le registre de la voix à l’unisson est généralement haut et fort. La danse est très sobre et douce quant à ses mouvements. Cela signifie que les participants bougent très doucement les épaules de haut en bas et impressionnent par des mouvements rythmés et des battements de pieds et de mains, tandis que la partie du corps située entre le ventre et les hanches est maintenue modestement droite. Ces mouvements doux découlent d’une éthique esthétique et morale dans cette société : tout doit être équilibré. “
Le peuple amazigh est célèbre pour ses compétences artistiques, de la poterie au tissage, des bijoux à l’art du henné et, en particulier, pour ses dessins exquis. Pour de nombreux artistes, cependant, leur travail est considéré comme un processus presque méditatif où ils ont l’occasion d’incorporer la « baraka » dans leur travail. Le concept de « baraka » est profondément ancré dans la culture amazighe et se traduit au mieux par « pouvoir spirituel » ou « pouvoir des saints ». Ce concept date de bien avant leur conversion à l’islam et consiste essentiellement à tenir les mauvais esprits à distance ou à éviter le « mauvais œil »,[xxxviii] en utilisant des symboles, des motifs et certaines couleurs dans leurs dessins.[xxxix]
On pense également que le henné, le laurier-rose, le santal et la myrrhe ont le même effet, c’est pourquoi les femmes amazighes aiment faire des dessins au henné sur leur peau. Même leur impressionnant maquillage des yeux au khôl est considéré comme un moyen traditionnel de se protéger par la créativité. Traditionnellement, les femmes berbères auraient également eu des tatouages sur le visage pour marquer le rite du passage de l’adolescence à l’âge adulte, mais comme les tatouages sont contraires à la loi islamique, le henné est souvent utilisé à la place. Certaines femmes amazighes portent également des couvre-chefs, appelés taHruyt, qui sont souvent colorés et brodés. Ces foulards sont considérés comme un prolongement de cette expression de soi à travers l’art décoratif, maintenant que les tatouages ne sont plus autorisés.
Égalitarisme et démocratie tribale
Le système de gouvernance traditionnel des Berbères suit des principes égalitaires, avec quelques exceptions chez certaines communautés. Le système égalitaire, récemment noté par le New Scientist,[xl] est basé sur la consultation et la coopération entre les tribus au sein d’un conseil tribal, afin d’assurer au mieux la survie de l’ensemble du groupe ; comme cela a été le cas pendant des dizaines de milliers d’années sans autres problèmes majeurs que les « invasions étrangères » et les famines naturelles.
Dans ce sens, Deborah Rogers écrit dans un article intitulé : Inequality: Why egalitarian societies died out publié dans NewScientist :[xli]
“Depuis 5000 ans, l’homme s’est habitué à vivre dans des sociétés dominées par quelques privilégiés. Mais il n’en a pas toujours été ainsi. Pendant des dizaines de milliers d’années, les sociétés égalitaires de chasseurs-cueilleurs étaient très répandues. Et comme le montre un grand nombre de recherches anthropologiques, bien avant que nous nous organisions en hiérarchies de richesse, de statut social et de pouvoir, ces groupes appliquaient rigoureusement des normes qui empêchaient tout individu ou groupe d’acquérir plus de statut, d’autorité ou de ressources que les autres.
La prise de décision était décentralisée et le leadership ad hoc ; il n’y avait pas de chefs. Il y avait bien sûr des luttes sporadiques entre individus, mais il n’y avait pas de conflit organisé entre groupes. Il n’y a pas non plus de notion forte de propriété privée et donc pas de nécessité de défense territoriale. Ces normes sociales affectent également les rôles des sexes ; les femmes sont d’importantes productrices et relativement autonomes, et les mariages sont généralement monogames. “
L’un des aspects les plus fascinants de l’égalitarisme est que le système élimine la pauvreté et empêche l’émergence des super riches et des super puissants dans la société, simplement parce que la constitution égalitaire (les « lois coutumières » de la société tribale amazighe : azref) garantit le partage de la récolte de la nature entre tous les membres de la société – et pas seulement le 1% d’élite.
Chaque tribu a un chef de tribu représentatif au conseil tribal – le parlement des sociétés d’aujourd’hui. Le conseil tribal égalitaire des anciens est composé de membres intègres de la société, hommes et femmes, qui peuvent donner l’exemple et avec une préférence pour la séniorité. Ils n’ont pas de politique électorale compliquée.
Les membres élus de la jma’ath apportent des solutions pacifiques par le biais d’un « dialogue diligent« , au sein du conseil tribal, principalement pour éviter les conflits. Ils ont appris à la dure comment vivre avec la nature et les conditions difficiles de l’environnement. Ils savent que la faim et les guerres créent un environnement propice à la corruption et au crime, et donc les outils ultimes que l’élite utilise pour soumettre les pauvres dans la société moderne.
Dans la société traditionnelle, c’est le partage à 100 % qui permet à la société de rester forte et pacifique. Par exemple, les Berbères fournissent des céréales et des fruits pendant la récolte aux familles pauvres de la tribu et de la société dans son ensemble. Les Berbères persécutés de la Libye continuent à ce jour de pratiquer ce qu’ils appellent la « taqessamit« , une fête au cours de laquelle les membres de la tribu se « réunissent » au printemps pour fournir des portions égales de viande aux familles pauvres de la société, afin de nourrir leurs enfants affamés. Ces portions de viande étaient coupées en longues lanières, saupoudrées de poivre et de sel, et séchées au soleil, avant d’être coupées en petits cubes, frites dans l’huile, et conservées dans des bocaux en argile, pour être utilisées toute l’année pour un usage modeste.
Selon un conte égalitaire (improvisé), un père mourant rassemble ses fils et ses filles autour de son lit de mort, et chuchote : « Prenez un bâton et cassez-le, vous verrez le résultat ; faites de même avec un « fagot de bâtons », et vous ne réaliserez rien d’autre que la force pure.
Le système politique amazigh se base sur une gouvernance égalitaire, une démocratie dynamique et participative connu sous le nom d’ait rab’in, un conseil tribal élu par les différents clans, dans la transparence totale, pour défendre leurs intérêts et les protéger dûment des invasions externes et promouvoir leur culture dans l’espace et dans le temps.[xlii]
Identité amazighe au Maroc
Comme de nombreux pays d’Afrique, le Maroc lutte pour définir son identité nationale. Alors que le pays est un creuset d’ethnies, l’identité arabe a monopolisé la vie publique pendant des siècles. Mais ces dernières années, des segments importants de la population marocaine ont demandé une reconnaissance accrue de leurs racines historiques. Cette demande de reconnaissance – appelée « berbérisme » ou « nationalisme berbère » d’après le groupe ethnique qui habitait le Maroc à l’origine – pourrait potentiellement donner au pays un nouveau souffle et mettre en œuvre un projet de société multiculturelle et un système politique démocratique et ouvert.
Les principaux militants et intellectuels amazighs continuent de soutenir que toute voie vers une plus grande démocratie dans le Royaume doit inclure la fin de leur marginalisation. Historiquement Les Amazighs se sont mobilisés autour des questions de culture et de langue, avec un intérêt commun pour obtenir le statut de langue officielle du Tamazight.
De nombreux défenseurs des droits de l’homme font référence à des décennies de discrimination institutionnelle dus aux politiques d’arabisation élaborées sur les années qui ont suivi l’indépendance. Ils affirment que les décisions qui ont inclus la désignation de l’arabe comme langue officielle de l’état ont non seulement négligé leur héritage culturel, mais ont également privé les Amazighs de possibilités d’éducation et d’emploi, et les ont désavantagés dans la gestion des affaires juridiques.
Sur ce point, Marguerite Rollinde écrit :[xliii]
“Contre le consensus autour d’un Etat nation représenté par un territoire, une langue, une religion, le mouvement amazighe, au Maroc, présente une revendication fondée sur « la reconnaissance et le respect des droits linguistiques et culturels légitimes de l’ensemble des composantes du peuple marocain » (Charte d’Agadir. 1991). Il s’agit de bouleverser le champ idéologique articulé autour de « l’arabité exclusive » du Maghreb, en lui opposant des objectifs de pluralisme et de démocratie. Une telle volonté remet en cause le monopole de représentation de la réalité sociale détenu par les élites citadines et peut déclencher des transformations profondes de la société. Pour certains intellectuels berbères, il s’agit de défendre en même temps le berbère et l’arabe dialectal, puisqu’il s’agit de défendre la culture populaire. Mais c’est aussi au nom de cette démocratie que certains militants marocains, loin de tout esprit de pluralité, contestent l’existence même d’arabes dans les sociétés du Maghreb, ou, à l’inverse, rejettent leur marocanité « Amazigh, c’est un homme libre, je suis amazigh–berbère, puis africain. Je ne suis pas marocain, car je définis les Marocains comme arabophones et les gens qui ont le pouvoir ce sont les arabophones, les orientalistes ».“
Les changements apportés à la constitution pour répondre aux demandes des Amazighs ont signalé un changement potentiel dans la politique amazighe de l’état. D’éminentes voix amazighes ont salué les révisions reconnaissant la langue et la culture amazighes comme la plus grande réalisation depuis des décennies. Cependant, ils ont tempéré leur optimisme par un profond scepticisme, conscient des efforts antérieurs de la monarchie pour coopter le mouvement.
Lorsque le roi du Maroc Mohammed VI a inauguré l’Institut royal de la culture amazighe -IRCAM- en 2002, certains ont interprété cette initiative comme une tentative de monopoliser l’agenda amazighe et de fragmenter la cause. Les concessions royales ont divisé les Amazighs à maintes reprises au fil des ans, séparant ceux qui veulent faire de la politique d’état de ceux qui se méfient de l’establishment et de son histoire qui consiste à monter les opposants politiques les uns contre les autres.
Les militants ont également observé que les nouvelles mesures constitutionnelles manquaient de mécanismes clairs pour une application pratique, ce qui fait craindre que les élites étatiques hostiles aux demandes des Amazighs étouffent tout processus législatif visant à faire connaître le tamazight au grand public et à l’administration.
Des personnalités de haut rang de l’ensemble du spectre politique reprochent fréquemment au mouvement amazigh ses tentatives d’insérer leur récit dans le discours politique national, accusant les militants d’alimenter les tensions ethniques entre les Marocains et de saper le lien de la nation avec la communauté arabo-musulmane.
Les Berbères en Libye
En Libye, les Berbères ont été longtemps subjugué par le régime pan-arabiste/pan-islamique et pan-africain du mégalomane et dictateur Mouammar Qaddafi. Avec sa déchéance en 2011, lors du Printemps arabe, ils ont saisi l’occasion au vol pour formuler leurs doléances de reconnaissance culturelle. Dans cette perspective, Glen Johnson a écrit dans le Los Angeles Times : [xliv]
“La lutte de Zuhair avec son identité reflète une quête plus large en Libye, alors que le pays tente de se remettre du règne de Moammar Kadhafi, qui a duré quatre décennies et dont le régime nationaliste arabe a longtemps réprimé les cultures minoritaires.
Cette jeune femme de 21 ans est membre des Amazigh, plus communément appelés Berbères, qui connaissent une résurgence de leur ancienne culture. Mais cette renaissance met en évidence des aspirations contrastées dans une Libye post-Kadhafi où des jeunes mondialisés comme Zuhair rêvent d’une plus grande autonomie tandis que les traditionalistes et les conservateurs religieux trouvent du réconfort dans des restrictions plus familières. “
Faisant partie de ce qui était autrefois le groupe ethnique dominant dans toute l’Afrique du Nord, les Berbères de Libye vivent aujourd’hui principalement dans des zones montagneuses reculées ou dans des localités désertiques où les vagues successives de migration arabe n’ont pas réussi à se rendre ou vers lesquelles ils se sont repliés pour échapper aux envahisseurs. Dans les années 1980, les Berbères, ou locuteurs natifs de dialectes berbères, représentaient environ 5 %, soit 135 000 personnes, de la population totale, bien qu’une proportion nettement plus importante soit bilingue en arabe et en berbère.[xlv]
Les noms de lieux berbères sont encore courants dans certaines régions où le berbère n’est plus parlé. La langue survit notamment dans les hautes terres de Jabal Nafûsah en Tripolitaine et dans la ville cyrénaïque d’Awjilah. Dans cette dernière, les coutumes d’isolement et de dissimulation des femmes ont été largement responsables de la persistance de la langue berbère. Parce qu’elle est largement utilisée dans la vie publique, la plupart des hommes ont acquis l’arabe, mais elle n’est devenue une langue fonctionnelle que pour une poignée de jeunes femmes modernisées.[xlvi]
Le régime dictatorial du colonel Mouammar Qaddafi (1969-2011) a imposé pendant quatre décennies une identité nationale centrée sur l’arabité à laquelle il a ajouté, avec le temps et le développement exponentiel de sa mégalomanie, l’africanité et l’islamité, sans oublier pour autant l’universalité maladive. Avec l’avènement des révolutions de 2011 en Afrique du Nord et au Moyen Orient, l’amazighité a fait surface, avec force, en Libye. A ce sujet Thierry Desrues écrit :[xlvii]
“L’irruption de forces armées amazighes aux avant-postes du soulèvement contre le régime du colonel Kadhafi en 2011 a bouleversé les représentations hégémoniques d’une société « arabe » homogène. Les télévisions du monde entier ont retransmis les images des drapeaux amazighs flottant au sein des terroirs amazighs de l’ouest du pays – de la petite ville côtière de Zouara (50 000 habitants) aux monts de l’Adrar Nefoussa. À mesure que les forces loyales au régime se retiraient, ces drapeaux étaient brandis dans d’autres lieux, notamment à Tripoli, témoignant du brassage des populations dans la capitale du pays. Pour la première fois depuis des années, des Amazighs pouvaient enfin s’exprimer publiquement dans leur langue et manifester leur identité, et ce, parfois à la surprise de certains de leurs compatriotes qui déclaraient ignorer de quoi il ressortait. “
Opposition à l’arabisation en Algérie
En avril 1980, à l’université de Tizi-Ouzou (100 km à l’est d’Alger) naît un mouvement de protestation pacifique. Il visait à contester l’interdiction gouvernementale d’une conférence organisée par l’éminent intellectuel Mouloud Mammeri, dans le but de promouvoir la langue et la culture amazighes mais aussi d’émanciper les libertés démocratiques. La manifestation a été violemment réprimée par les forces de sécurité.
Face à cette violence, diverses parties de la région de Kabylie ont appelé à une grève générale, ponctuée de marches – une protestation organisée qui a gagné toute la Kabylie et a été suivie par la naissance du « Printemps berbère » (Tafsut n’Imazighen). Un mouvement qui a donné du courage à toute la population au moment où le mur de la terreur érigé par le régime depuis 1962 risquait de s’effondrer. Les Algériens n’avaient plus peur de sortir et de manifester pour exprimer leur mécontentement. Les vingt-quatre leaders des manifestations, qualifiés de « fauteurs de troubles » et risquant la peine de mort, ont été arrêtés mais finalement relâchés grâce à la mobilisation de toute la région et à la pression de la communauté berbère extérieure, principalement en France.
La capitale kabyle, Tizi-Ouzou, est le bastion de l’opposition à l’arabisation. Tout au long des années 1970, des musiciens et des poètes berbères ont utilisé une forme modernisée de musique berbère traditionnelle pour critiquer implicitement le régime algérien. Bien que la demande populaire ait finalement forcé le gouvernement à autoriser la diffusion de cette musique, les chanteurs et les groupes n’étaient pas autorisés à se produire dans la région kabyle. En 1980 des manifestations ont été accueillies avec violence par les troupes gouvernementales ; plus de 30 personnes sont mortes et plusieurs centaines ont été blessées et arrêtées.
Le mouvement culturel berbère, fondé à la fin des années 1960, et d’autres organisations berbères ont généralement soutenu l’idée d’un État bilingue en Algérie, en reconnaissant la langue berbère et l’arabe familier qui, plutôt que l’arabe littéraire, est la langue de la majorité de la population. De ce fait, ils se sont souvent alliés à des non-Berbères qui souhaitent parvenir à une société plus démocratique et pluraliste.
En 1985, d’autres arrestations et emprisonnements de militants berbères ont eu lieu. Les manifestations nationales spontanées d’octobre 1988 auxquelles les Berbères ont participé à Alger et en Kabylie ont forcé le gouvernement algérien à soutenir le changement constitutionnel, y compris la fin du système de parti unique. En juillet 1989, l’Assemblée nationale a adopté une nouvelle loi sur les partis politiques qui permettait aux groupes indépendants du Front de libération nationale (FLN) de demander leur enregistrement et de participer aux élections nationales. Parmi les partis qui se sont portés candidats figuraient le Front des forces socialistes (FFS) et le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), une autre organisation politique d’origine berbère. La nouvelle loi interdit toutefois les groupes basés exclusivement sur une religion, une langue, une région, un sexe ou une race particuliers et stipule que les partis doivent utiliser uniquement la langue arabe dans leurs communiqués officiels.
En 2001, des années d’agitation berbère pour une plus grande reconnaissance de leur langue, de leur musique et de leur culture tamazight ont abouti à des émeutes et à des dizaines de morts. Le gouvernement a modifié la constitution en octobre 2001 pour faire du berbère une langue « nationale », mais pas une langue « officielle ». La mise en œuvre en janvier 2005 de nouvelles concessions vagues du gouvernement aux demandes berbères, issues des troubles de 2001, a depuis été éclipsée par un accord entre le gouvernement et les extrémistes islamiques.
En février 2006, le cabinet du président Abdelaziz Bouteflika a déclaré une amnistie de six mois pour la plupart des militants islamistes impliqués dans la guerre civile des années 1990 s’ils acceptaient de désarmer, mais à son expiration, moins de 300 militants avaient accepté l’offre. La vaste loi d’application de la charte pour la paix et la réconciliation nationale a également criminalisé la discussion sur le conflit. Certaines organisations berbères favorables à un état algérien laïque, comme le Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie (MAK),[xlviii] craignaient que le gouvernement Bouteflika ne se rapproche trop des islamistes, même si cette relation restait ambivalente. En octobre 2006, le président de l’Assemblée populaire de la province de Tizi Ouzou, en Kabylie, a été tué par balle. Le gouvernement a accusé les militants islamistes de cet assassinat et de deux autres assassinats de dirigeants berbères au cours des 13 mois précédents.
Les principaux centres kabyles, en particulier la wilaya (province) clé de Tizi Ouzou, ont vu se développer ce qu’un commentateur local appelle « l’apathie militante » au sein de l’électorat berbérophone. Cela s’est traduit par un taux de participation historiquement bas aux élections législatives de mai 2007. En outre, on a constaté une augmentation des tensions locales au sein des partis nationaux, notamment le Front de libération nationale (FLN) et le Front des forces socialistes (FFS). Dans la ville de Berriane, au sud du pays, trois jours de combats ont éclaté entre des gangs berbères et arabes rivaux en mai 2008.
Pendant plus de deux ans à partir de 2013, des affrontements entre Arabes et Berbères ont eu lieu dans la partie sud du pays – la ville de Ghardaïa, capitale de la province du même nom dans la vallée du M’zab, qui se trouve à 600 km au sud d’Alger. Les tensions entre les deux communautés se sont accrues pour les emplois, le logement et la terre. Les Berbères, localement connus sous le nom de Mozabites, sont des adeptes du rite islamique Ibadi, qui remonte à une division dans les premiers temps de l’Islam. Les troubles ont commencé avec la destruction du mausolée d' »Ammi Moussa », le père de l’intégration dans la communauté mozabite de Ghardaïa, classée au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 1982.
Les deux communautés ne se faisaient pas confiance, et chacune se sentait marginalisée par l’autre. Les Berbères ont accusé les Arabes de bénéficier d’un traitement préférentiel de la part du gouvernement, notamment pour obtenir de meilleurs emplois et de meilleurs endroits pour vivre. Les Arabes ont accusé les Berbères, qui sont généralement perçus comme plus riches, d’entraver l’intégration des Arabes plus pauvres dans leurs structures sociales exclusives. Ces conflits ont été violents et ont fait plus de 22 morts et 200 blessés. Le gouvernement central a réagi 60 jours après le début du conflit en envoyant plus de 10 000 policiers et militaires pour contrôler la population et maintenir l’ordre.
Sur la question de ce conflit larvé entre Amazighs et Arabes dans cette région du pays, Andreas Gorzewski écrit dans Qantara :[xlix]
“Un représentant berbère s’est plaint que des gangs armés ont pris le contrôle des entrées de la ville de Guerara : « La situation est très mauvaise. Ce ne sont plus des affrontements, c’est du terrorisme ». A Alger, les Berbères ont protesté avec rage contre l’escalade du conflit. Le président Abdelaziz Bouteflika a rapidement convoqué les ministres ainsi que les commandants de l’armée et de la police pour une réunion de crise. Les soldats sont maintenant chargés de rétablir l’ordre.
Les Arabes et les Berbères vivent pacifiquement ensemble en Algérie depuis longtemps. Les deux groupes diffèrent, au moins en partie, par leur religion et leur langue. Les Berbères représentent environ 30 % de la population algérienne, mais dans la province de Ghardaïa, ils sont majoritaires depuis des siècles. Les Berbères y sont adeptes de l’école islamique Ibadi, qui remonte aux divisions confessionnelles des premiers temps de la religion. Les Arabes, en revanche, sont des musulmans sunnites.
Ce n’est qu’au cours des dernières décennies que de nombreux Arabes ont migré vers la région, considérée comme la porte du Sahara. Lorsque le gouvernement a fait pression pour l’arabisation de la population, de nombreux Berbères en sont venus à se sentir discriminés en raison de leur langue et de leur culture. Les premiers affrontements entre les deux groupes ont eu lieu fin 2013. Depuis lors, des escarmouches régulières ont eu lieu entre les Berbères et les Arabes. Cependant, c’est la première fois que le nombre de morts est aussi élevé et les dégâts aussi importants. Des témoins oculaires accusent l’utilisation d’armes à feu, que l’on voit ici pour la première fois. “
Nouvel an amazigh
Bien que les anthropologues disent qu’il est difficile d’établir avec précision les éventuelles racines historiques du Nouvel An berbère, connu sous le nom de Yennayer. Certains historiens le relient à l’intronisation en tant que pharaon du roi amazigh Sheshonq I après avoir vaincu Ramsès III, qui aurait eu lieu en 950 avant J.- C. Les Amazighs ont réussi à établir une nouvelle monarchie qui a régné de la Libye à l’Égypte. Cette glorieuse victoire a marqué le début du calendrier amazigh.
Le nouvel an amazigh, également appelé Yennayer, marque le premier jour de l’année agricole berbère. Il correspond au premier jour de janvier dans le calendrier julien, plutôt qu’au calendrier grégorien que nous connaissons mieux. 2020 marque l’année berbère 2970. Les Berbères appellent parfois cette fête « id u-suggas« , ce qui signifie « nuit de l’année ». Et les communautés arabes l’appellent « Hagouza« , qui signifie « Année agraire ».
Le peuple berbère célèbre Yennayer au Maroc, en Libye, en Tunisie et dans certaines parties de l’Égypte. Le gouvernement algérien le reconnaît comme une fête nationale. Au Maroc, de nombreuses personnes travaillent pour que Yennayer soit également reconnu comme une fête nationale.
En tant que fête agricole, Yennayer est une célébration de la vie. Comme le nouvel an que la plupart des gens connaissent, c’est un moment où les gens font des vœux de longévité, de prospérité et d’avenir. C’est un jour propice aux mariages et à d’autres événements importants de la vie. Les enfants passent par d’importants rites de passage à Yennayer. Les garçons peuvent recevoir leurs premières coupes de cheveux. Et les parents envoient leurs enfants chercher des fruits et des légumes.
La nourriture occupe une place importante dans la célébration et plusieurs plats sont traditionnellement servis lors de cette journée spéciale. L’orkimen est une soupe épaisse à base de fèves sèches et de blé. Le couscous est un autre plat traditionnel, et à Yennayer, il est spécialement préparé avec sept légumes. Et le tagola est un repas de grains de maïs préparé avec du beurre, du ghee, de l’huile d’argan et du miel. Une graine de datte ou un morceau d’amande peut être caché dans le tagola ou le Couscous. Celui qui trouve la graine ou la noix est censé être béni tout au long de l’année. Dans certaines familles, on lui confie également les clés de la salle de stockage pour l’année.
Yennayer est également célébré par de la musique et des danses, comme l’Ahwach et les danses Ahidous. Des activités éducatives sont souvent organisées pour les personnes qui souhaitent en savoir plus.
Il existe également de nombreuses traditions et pratiques étonnantes qui accompagnent la nourriture que les Amazighs préparent pour cette nuit de fête. Outre les danses et les chants spéciaux d’amour, de fertilité et de prospérité, qui accueillent une nouvelle année agraire, les Amazighs, en particulier ceux qui vivent à la campagne, trouvent en cette occasion une meilleure chance de socialiser, d’échanger de la nourriture et de se réconcilier avec ceux avec qui ils ont eu quelques malentendus.
Le rôle pivot[l] de la femme amazighe
L’oralité des femmes analphabètes est un facteur majeur dans la survie de tamazight, car elles utilisent cette langue dans la communication domestique, élevant enfants, et en répétant des histoires folkloriques, des poèmes, des proverbes, des chansons et des histoires familiales et culturelles. Etant donné que tamazight, n’est pas la langue d’enseignement dans l’enseignement formel, il incombe aux femmes amazighes de transmettre la connaissance de la langue maternelle aux générations suivantes. Et en tant que principales personnes s’occupant des enfants, les femmes sont le premier lien des enfants avec le tamazight, ce qui confère à la langue son statut de langue maternelle et consolide sa longévité malgré son manque de représentation dans la sphère publique.
Fanack.com écrit à ce propos :[li]
“Les femmes sont valorisées en tant que gardiennes de la langue et de la culture berbères, essentielles à la construction de l’identité. La construction et la préservation de l’identité à travers l’art est également au cœur de l’action religieuse et spirituelle des femmes berbères. Par leurs expressions artistiques, les femmes contrôlent non seulement les mariages comme moyen de préserver le caractère sacré de la spécificité culturelle au milieu de puissantes influences sociétales, telles que la modernisation, qui affectent rapidement leur vie, mais elles tissent également des tapis, fabriquent des tentes et des poteries, décorent le visage, les mains et les pieds au henné et brodent des vêtements qui renforcent l’identité ethnique berbère. Par l’art et la transmission mère-fille, les femmes berbères relient le passé au présent. “
Une autre raison pour laquelle les femmes peuvent être considérées comme les principaux acteurs de la préservation de tamazight se trouve dans leur rôle connexe de gardiennes de la culture. En plus de gérer leur foyer et d’élever leurs enfants, les femmes jouent un rôle essentiel dans la préservation du patrimoine artistique et culturel amazigh grâce à leur travail dans des domaines tels que le textile, la musique, la poésie et la danse.
Sur ce point, Fanack.com écrit aussi :[lii]
“Les femmes sont valorisées en tant que gardiennes de la langue et de la culture berbères, essentielles à la construction de l’identité. La construction et la préservation de l’identité à travers l’art est également au cœur de l’action religieuse et spirituelle des femmes berbères. Par leurs expressions artistiques, les femmes contrôlent non seulement les mariages comme moyen de préserver le caractère sacré de la spécificité culturelle au milieu de puissantes influences sociétales, telles que la modernisation, qui affectent rapidement leur vie, mais elles tissent également des tapis, fabriquent des tentes et des poteries, décorent le visage, les mains et les pieds au henné et brodent des vêtements qui renforcent l’identité ethnique berbère. Par l’art et la transmission mère-fille, les femmes berbères relient le passé au présent. “
Là encore, les femmes, bien qu’analphabètes sont particulièrement importantes car elles insufflent à ces arts des traditions orales transmises de génération en génération. Par exemple, les femmes donnent des noms tamazight aux motifs de leurs textiles et les transmettent à leurs filles. Les noms varient en fonction de la similitude que le tisserand imagine entre le motif et les objets environnants ou le monde naturel, de sorte qu’un même motif peut porter une multitude de noms tamazight descriptifs pour différents artistes et familles.
Le chant et la danse ont des traditions orales similaires : des mouvements spécifiques ont également une appellation amazighe descriptive en fonction des actions qu’ils invoquent, et les paroles des chansons ne sont jamais écrites mais plutôt transmises oralement sur plusieurs générations.
Les tapis amazighs marocains sont uniques et ont une histoire fascinante en tant que l’un des styles de tapis d’art populaire les plus célèbres. Ces tapis ont été fabriqués en continu depuis plus de deux millénaires. Dès le premier exemple, le tissage des tapis marocains était la responsabilité des femmes amazighes à la fois sur le plan de la création, du tissage et de la représentation artistique.[liii]
Les femmes étaient chargées de conserver et de transmettre les connaissances nécessaires à la fabrication de ces tapis, notamment les secrets des motifs familiaux, les techniques de bouclage et les couleurs à utiliser. Toutes ces connaissances sur l’histoire du tissage des tapis amazighs étaient transmises de façon matrilinéaire, chaque génération de femmes étant chargée de les transmettre à la suivante. Les tapis étaient utilisés au sein des groupes tribaux comme couvertures de maison, couvertures de chevaux, étendards, drapeaux et autres objets utilitaires.
A ce sujet Sud Est Maroc.com écrit :[liv]
“Le tapis berbère, encore appelé Azetta, est le tapis des tribus berbères. Issue d’un des trois grands ensembles berbères (Masmouda, Zénètes et Sanhadja) ou d’origine arabe bédouine, chaque tribu a élaboré au cours de son histoire et de ses pérégrinations un style particulier esthétique et technique dans le tissage de ses tapis. Plus qu’un artisanat utilitaire, le tissage est ainsi devenu l’étendard du nom de chacune de ces tribus, dans l’expression de leurs qualités respectives, leur simplicité, leur rusticité et leur sobriété, mais aussi leur vivacité faite de bonne humeur et d’une mélancolie presque naïve.
Le tapis berbère, c’est aussi celui des femmes berbères, celles des campagnes et montagnes de l’Atlas, qui de mères en filles se transmettent les techniques comme les motifs d’un langage sibyllin où se mêlent à une géométrie abstraite et énigmatique les symboles de l’écriture Tifinaghe en expression de l’identité amazighe, ou encore l’imagerie universelle des scènes de la vie quotidienne (figure animale, dessin d’oiseaux, de chameaux …). Le tissage des tapis constitue une activité vitale pour ces familles berbères de tradition pastorale qui y trouve l’une de leurs principales sources de revenus. “
Les Touaregs : dernier contrefort de la culture amazighe authentique
Même s’ils ont conservé la langue et bon nombre des coutumes de leurs ancêtres berbères, les Touareg ont développé une culture unique qui leur est propre, une véritable synthèse de nombreuses traditions, y compris non seulement berbères et arabes, mais aussi des éléments des peuples indigènes qui résident au Sahel.
Une aura de mystère et de romantisme entoure les nomades du désert connus sous le nom de Touaregs. Longtemps connus comme guerriers, commerçants et guides compétents dans le désert aride et rude du Sahara, les Touaregs voient leur indépendance gravement menacée par les sécheresses répétitives qui tuent leurs troupeaux et par les frontières internationales qui limitent considérablement leurs déplacements. Beaucoup ont été contraints d’abandonner leur mode de vie nomade et de se sédentariser, formant de petits villages ou se déplaçant vers les villes pour y trouver du travail.
Au sujet de l’origine des Touaregs, Maman Saley écrit dans Civilisations :[lv]
“D. Hamani, historien spécialiste de la question targuie, donne plusieurs versions sur l’origine du terme Touareg et donc sur l’origine du peuple touareg. Nous proposons quelques-unes de ces versions selon lesquelles le terme Touareg proviendrait de la racine « Taraka » qui, en arabe, signifie abandon.
Dans une première version D.Hamani rapporte que douze fois, les Berbères adoptèrent l’Islam. A la suite de ces apostasies ils auraient été appelés « Tawarik » ; c’est-à-dire ceux qui ont abandonné l’Islam.
Dans une autre version, toujours liée à la racine Taraka, les Touareg seraient issus d’un métissage entre Berbères et Arabes. Selon cette version, un Arabe du nom de Diap al Halali tua un jour un démon (Afrit) près d’un village berbère. Le monstre exigeait chaque jour une jeune fille vierge. Lorsque les villageois demandèrent à l’Arabe ce qu’il voulait comme récompense, celui-ci, ayant avec lui 40 compagnons, demanda 40 jeunes filles vierges pour ses hommes. Les femmes restèrent seules après le départ de Diab et ses compagnons. Ainsi, celles qui étaient grosses et qui accouchèrent après le départ de leurs maris appelèrent leurs enfants Touarek, c’est-à-dire abandonnés. “
Le peuple touareg représente une ramification saharienne des Berbères, qui résident en Afrique du Nord depuis plusieurs millénaires. Alors que les Touaregs d’aujourd’hui sont nominalement musulmans, leurs ancêtres ont fui vers le désert du Sahara pour éviter de se soumettre aux conquérants arabes et de se convertir à l’Islam. Suite aux conquêtes arabes au 7ème siècle après J.-C., puis aux immigrations de Bédouins en Afrique du Nord au 11ème siècle après J.-C., de nombreux groupes de Berbères ont cherché refuge dans les oasis du Sahara. Ils y adoptent un mode de vie nomade et prédateur, calqué sur celui de leurs envahisseurs.
Bien qu’ils aient conservé la langue et bon nombre des coutumes de leurs ancêtres berbères, les Touaregs ont développé une culture unique qui leur est propre, véritable synthèse de nombreuses traditions, comprenant non seulement Berbères et Arabes, mais aussi des éléments des peuples indigènes qui résident au Sahel. Les organisations politiques touaregs s’étendent au-delà des frontières nationales, et ces pasteurs nomades habitent une région d’Afrique du Nord qui s’étend du centre de l’Algérie et de la Libye au nord au nord du Nigeria au sud, et de l’ouest de la Libye à l’est jusqu’à Tombouctou, au Mali, à l’ouest. On estime aujourd’hui à 1,3 million le nombre de Touaregs, dont la plupart vivent au Mali et au Niger.
La société touareg est traditionnellement féodale, avec cinq castes : les nobles, les vassaux, les hommes saints, les artisans et les ouvriers (anciens esclaves). Les Touaregs sont traditionnellement monogames et ont un système d’héritage matrilinéaire. En cela, ils se distinguent nettement de leurs parents berbères, des Arabes et de la plupart des autres peuples subsahariens.
La plupart des Touaregs de l’Azawak ont conservé une existence entièrement nomade et élèvent du bétail, des chameaux, des chèvres et des moutons. Ils résident dans des camps de 50 à 150 personnes et vivent dans des tentes aux poteaux de bois recouverts d’une bâche en peau de chèvre teinte en rouge.
Pendant la saison des pluies, ils déplacent le campement tous les trois ou quatre jours à la recherche des pâturages les plus verts pour leur bétail. Pendant la saison sèche, ils se déplacent souvent pour trouver de l’eau, mais préfèrent rester à proximité de leur « territoire d’origine », une terre transmise d’une génération à l’autre.
Les villages touaregs sédentaires sont de plus en plus courants à mesure que les troupeaux de bétail diminuent. Ce phénomène est largement dû au changement climatique qui a entraîné des saisons des pluies de plus en plus courtes et des périodes de sécheresse plus longues, et donc moins de pâturages pour les animaux. Sans animaux pour fournir du lait et de la viande, ou un moyen de troc pour les marchandises d’échange, les nomades s’installent dans de petits villages de 100 à 300 personnes et tentent de vivre de l’agriculture de subsistance, en cultivant principalement le millet et le sorgho. Ces populations sédentaires abandonnent leurs villages pendant les mois les plus durs de la saison sèche, lorsqu’elles doivent elles aussi se rendre d’une source d’eau éloignée à une autre.
Culture amazighe, substrat de la culture marocaine
La culture amazighe est un élément central du mode de vie et du système de croyances populaires dominants au Maroc. Les Amazighs sont les premiers habitants du Maroc. Ils ont continuellement vécu dans ce pays pendant plus de cinq mille ans. En tant que peuple le plus ancien du Maroc, les Amazighs ont introduit de nouvelles pratiques et croyances dans ce pays pendant de nombreux siècles. La culture amazighe est un substrat pertinent de la culture marocaine au 21ème siècle et que les cultures arabe et amazighe sont inextricablement liées. Des exemples spécifiques d’influences culturelles amazighes sur les pratiques sociales et les croyances dominantes au Maroc permettront d’étayer l’affirmation selon laquelle la culture amazighe est au cœur du mode de vie et des systèmes de croyances marocains dominants.
Le « mode de vie » est défini comme la façon dont les êtres humains organisent leur vie et le « système de croyances » comme un ensemble de convictions avec lesquelles les êtres humains s’orientent de manière cosmologique et temporelle. La culture amazighe est à la base du mode de vie et du système de croyances dominants dans le Maroc contemporain.
Les exemples d’influence amazighe sur les modes de vie populaires marocains justifient le rôle actif que les premiers habitants du Maroc ont joué dans le façonnement de la société marocaine cosmopolite actuelle. La twiza, ou réseau de soutien familial, est un concept amazigh qui est devenu le fondement de la structure sociale contemporaine du Maroc. Le concept de twiza préconise le soutien familial de l’individu en commençant par la famille immédiate et en s’étendant vers l’extérieur à des cercles concentriques de famille élargie si nécessaire. L’objectif de twiza est de soutenir un membre individuel de la famille amazighe en mettant en commun les ressources de sa famille si nécessaire.
Malgré des siècles de tentatives officielles de marginalisation de la culture amazighe au Maroc, des concepts tels que twiza restent répandus dans tout le pays. Au Maroc, diverses cultures (notamment arabe et gnawi) adhèrent à twiza pour maintenir la stabilité individuelle par le biais de la solidarité familiale. La twiza se manifeste par un soutien moral et matériel. Par exemple, dans la société amazighe traditionnelle, un homme qui perd sa richesse recevra un soutien financier de sa famille proche. Si sa famille immédiate n’est pas en mesure de l’aider, sa famille élargie lui offrira une aide financière par ordre de consanguinité avec lui.
Aujourd’hui, le réseau de soutien dominant au Maroc est la cellule familiale. Les familles marocaines, qu’elles s’identifient comme arabes, amazighes ou les deux, agissent comme un réseau de soutien disponible pour les membres de la famille dans le besoin. Le concept amazigh de twiza valorise le soutien familial et renforce la cellule familiale en tant que structure sociale fondamentale de la société marocaine contemporaine. Twiza est l’une des nombreuses influences amazighes sur le mode de vie dominant au Maroc.
La contribution des Amazighs aux systèmes de croyance marocains se manifeste de nombreuses façons. La contribution des Amazighs à l’Islam populaire dans ce pays. L’Islam sunnite de l’école jurisprudentielle Maliki est la tradition religieuse dominante au Maroc. Le soufisme (tasawwouf), ou croyance aux Amis de Dieu (awliyâ’ Allah), est une école répandue de mysticisme islamique qui renforce les principes centraux de l’Islam (osoul al-dîn) en prônant la dévotion humaine aux sages islamiques (sing. mourchid pl. mourchidoûn) qui appartiennent à des lignées d’enseignement complexes (sing. tarîqah, pl. toroq) qui s’étendent de génération en génération des sages contemporains au prophète Mahomet. Au Maroc, les coutumes et les systèmes de croyance amazighs sont au cœur de l’Islam populaire, y compris le soufisme tel que pratiqué par les musulmans sunnites maliki.
Les musulmans marocains adhèrent à diverses formes de soufisme d’influence amazighe allant de la tarîqah extrêmement antinomique à la tarîqah très austère axée sur la chari’a. Par exemple, certains musulmans marocains vénèrent la piété pratique d’Abd al-Jalil al-Doukkali, un fervent [walî soufi amazigh] du Haut Atlas dont l’islam est resté proche du légalisme de base des Almoravides. D’autres vénèrent les grands awliyâ’ amazighs de Fès et de Marrakech, Harzihoum et Abu Ya’za s’occupaient de questions légalistes (fiqh) et d’ascèse (zohd). Abu Ya’za (également connu sous le nom de Moulay Bou ‘Azza) ne parlait que le tamazight et était réputé pour sa profonde piété. Harzihoum, connu au Maroc sous le nom de Sidi Harazem, est devenu le saint patron d’une source dans une vallée près de Fès, un exemple emblématique de la persistance des croyances païennes en la divinité de la nature dans le christianisme et l’islam.
L’ancienne croyance animiste des Amazighs dans la signification religieuse des saisons a gagné une couche supplémentaire de signification islamique lorsque les disciples marocains (sing. mourîd, pl. mouridoûn) de l’Amazigh soufi Sidi Harazem ont associé le miracle (karamah) du printemps à cet Ami de Dieu. Le mysticisme islamique populaire, ou soufisme, au Maroc reconstitue les phénomènes religieux préislamiques par le biais d’un médium théologique islamique. Les Amazighs awliya’ Allah, ou Amis de Dieu, font le travail crucial de localiser la tradition islamique dans leur contexte linguistique et religieux amazigh. L’islam soufi populaire au Maroc est donc une tradition qui valorise à la fois le contexte culturel amazigh local et la tradition islamique.
Les relations entre l’Islam et les Amazighs au Maroc se renforcent mutuellement. L’islam constitue la tradition religieuse des Amazigh. Les Amazighs colorent à leur tour la tradition avec leurs langues, coutumes et croyances locales, dont certaines sont antérieures à l’Islam. Ces influences amazighes sur l’islam marocain s’étendent également au-delà de la communauté amazighe. Les musulmans soufis marocains de toutes origines ethniques s’inspirent des « awliyâ’ » amazighes comme Sidi Harazem.
La relation entre la culture amazighe et la société marocaine est directe. Les modes de vie amazighs ont trouvé leur place dans les modes de vie marocains dominants. Le système de twiza est un exemple de la contribution amazighe à une attitude culturelle marocaine cosmopolite qui considère la famille comme le fondement de la société. Les systèmes de croyances amazighs colorent également les interprétations et les pratiques de l’Islam dans ce pays. Les croyances et les modes de vie des premiers habitants du Maroc sont donc au cœur de la culture marocaine contemporaine.
Conclusion : Le future des Imazighens et de leur culture
Les Imazighens, également appelés Berbères, se définissent comme les habitants indigènes du Maghreb depuis des temps immémoriaux. Mais ils ont partagé ce territoire depuis des siècles avec d’autres groupes, notamment les Carthaginois, les Romains, les Ottomans et les Arabes. La marque distinctive de l’identité amazighe est leur langue, le tamazight, qui possède son propre alphabet, le tifinagh. Bien que les statistiques officielles soient controversées, certaines estimations situent le nombre d’Imazighens à environ 30 millions, répartis dans huit pays du Maghreb et du Sahel. Pour des raisons politiques et religieuses, leur langue a été progressivement marginalisée depuis les conquêtes arabes du 7ème siècle, un processus qui s’est accéléré à partir de la seconde moitié du 20ème siècle en raison des politiques d’arabisation menées par les pays issus de la fin de la période coloniale.
La vague de protestations qui s’est emparée de l’Afrique du Nord depuis 2010 a été l’occasion pour les mouvements sociaux, culturels et politiques qui languissaient dans une région étouffée par des dictatures fossilisées. L’un d’entre eux est le mouvement de défense des droits du peuple amazigh, des communautés ethnolinguistiques réparties dans plusieurs pays de la région. Les médias internationaux ont commis une erreur en appelant les soulèvements de 2011 le « Printemps arabe », ce qui efface d’autres groupes comme les Imazighens qui étaient à la pointe de ces luttes ne sont pas pris en considération.
Depuis les soulèvements, leurs demandes de reconnaissance culturelle se sont multipliées et si des progrès ont été réalisés dans plusieurs pays comme le Maroc et l’Algérie, les militants amazighs n’ont toujours pas vu leurs aspirations se réaliser en totalités.
Pour ce qui est de la situation des Amazighs en Afrique du Nord, Bruce Maddy-Weitzman écrit :[lvi]
“L’émergence du mouvement culturel berbère/amazigh, au Maroc, en Algérie et dans la diaspora berbère, pose des questions importantes aux régimes et sociétés nord-africains à l’aube du XXIe siècle. En outre, elle constitue un terrain fertile pour les étudiants en nationalisme, mémoire collective et identité. Les expériences berbères en Algérie et au Maroc ont été très différentes les unes des autres, et posent donc des séries de questions différentes aux régimes, sociétés et communautés berbères respectifs. Néanmoins, ces expériences ont entraîné une prise de conscience croissante des Berbères en tant que Berbères dans les deux endroits, ce qui inclut de plus en plus une dimension politique plus explicite. Les Amazighs kabyles coexistent mal avec les autorités de l’État dans une situation d’incertitude générale quant à la nature future de l’État. Le cas marocain est plus amorphe et moins ouvertement politique, mais il n’en reste pas moins qu’il fait partie de l' »imaginaire » du nouveau berbère. Le processus de remodelage et de redéfinition de la signification des identités collectives marocaine et algérienne a déjà commencé et sera certainement chargé de tensions et de difficultés. La manière dont la conscience collective berbère croissante interagit avec les États marocain et algérien, et avec d’autres segments de leurs sociétés, déterminera en grande partie le cours futur des affaires nord-africaines. “
Il est intéressant de noter qu’en Tunisie, le seul pays de la région à avoir réussi une transition vers la démocratie, les changements ont été moins nombreux. Après l’Égypte, la Tunisie est le pays de la région où la population parlant le tamazight est la plus faible. Les estimations les plus généreuses situent le nombre de locuteurs à près de 500 000 personnes, soit environ 4,5 % de la population tunisienne, alors que d’autres sources situent ce nombre à seulement 200 000 personnes, toutes concentrées dans quelques villages du sud du pays et dans la capitale.
L’autre pays où la cause amazighe a fait des progrès tangibles est la Libye. Le régime panarabe de Moammar Qaddafi, qui s’est effondré en 2011 à la suite d’une guerre civile, ne permettait aucune forme d’expression culturelle ou politique amazighe. Les Amazighs, se sont élevés contre la dictature en espérant que le nouveau régime garantirait leurs droits. Mais ces dernières années ont été difficiles. Les opposants à Qaddafi partagent son panarabisme et son hostilité à la diversité. On estime que 600 000 Libyens parlent l’amazigh, soit environ 10 % de la population totale du pays. La plupart d’entre eux sont concentrés dans le sud du pays et le long de la frontière avec la Tunisie à l’ouest.
Aujourd’hui, un mouvement identitaire berbère (amazigh) moderne a vu le jour en Afrique du Nord, exigeant un réexamen des prémisses sous-jacentes des identités collectives de leurs pays, un réexamen qui mettrait la langue et la culture berbères sur le devant de la scène. Il demande également une véritable amélioration des conditions de pauvreté qui caractérisent une grande partie du monde rural berbère. Alors que les régimes au pouvoir luttaient pour maintenir leur légitimité après un demi-siècle d’indépendance, la « question » berbère a pris une nouvelle dimension dans l’espace politique de plus en plus contesté de l’Afrique du Nord.
Notes de fin de texte :
[i] Cf. Basset, André. 1952. La langue berbère. Handbook of African Languages 1, ser. ed. Daryll Forde. London: Oxford University Press.
[ii] Cf. “histoire génétique de l’Afrique du Nord – Genetic history of North Africa ,“ https://fr.qwe.wiki/wiki/Genetic_history_of_North_Africa
[iii] Cf. Shatzmiller, Maya. “Le mythe d’origine berbère (aspects historiques et sociaux), “ in Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée, 1983, No. 35 : 145-156.
[iv] Cf. Charlier, René. “La Numidie vue par Salluste Cirta Regia : Constantine ou Le Kef?“.in: L’antiquité classique, Tome 19, fasc. 2, 1950 : 289-307.
[v] Cf. Wester-Ebbinghaus, Reed. « Berbers, » in Ancient History Encyclopedia.du 27 septembre 2016. https://www.ancient.eu/Berbers/
“The Berbers have occupied North Africa, specifically the Maghreb, since the beginning of recorded history and until the Islamic conquests of the 8th century CE constituted the dominant ethnic group in the Saharan region. Modern Berber speakers and cultural practitioners are a minority in North Africa, though Berber groups are considered the descendants of pre-Arab inhabitants of the region. In most classical texts they are referred to as Libyans. A widely-distributed and diverse ethnic group, the ancient Berbers spoke a subset of the Afro-Asiatic languages, linguistically related to that of the Egyptians, Kushites, Arabs, Syrians, Levantine tribes, and Somalis. Known to themselves as Amazigh, the Berbers take their more common name from the Latin barbarus (barbarian), a Roman effort to distinguish the less-developed tribal societies of much of Europe and Africa from their own Hellenic-derived civilization. Libya is a Greek word derived from a regional title, and the term came to be used interchangeably with the concept of Africa. “
[vi] Prince issu de la puissante tribu berbère libyenne des « Meshwesh » (ancêtres de la tribu amazigh des Hawara) le pharaon Sheshonq Ier (encore appelé Shoshek ou Sheshnak شيشنق) se hisse sur le trône d’Égypte vers 945 av. J.-C où il fondera la XXII° dynastie. Quelque temps après son accession au pouvoir, il entreprend une expédition militaire sans précédent depuis Ramsès II contre les deux royaumes hébraïques du Sud (royaume de Juda) et du Nord (royaume d’Israël). Sa campagne victorieuse nous est rapportée sur le mur méridional du temple d’Amon-Rê à Karnak (ancienne cité de Thèbes et actuelle Louxour en Egypte) où des hiéroglyphes confirment la conquête par le Pharaon Sheshonq notamment des places fortes antiques de Gezer et Har Megiddo (Armageddon) édifiées par le Roi Salomon lui-même. Pour éviter la mise à sac de Jérusalem, Roboam, fils du roi Salomon, roi de Juda, a cèdé à Shéshonq tous les trésors du premier Temple et du palais (v. La Bible, Ancien Testament, Chapitre les Rois XIV, 26). Des ruines de la cité antique de Gezer récemment mises à jour en Israël par les archéologues (http://www.gezerproject.org/) mettent en évidence les traces de destruction par le feu de cette place forte antique attribuée par les experts à l’armée de ce pharaon berbère Sheshonq Ier. La question reste ouverte et débattue par les experts de savoir si c’est bien ce même roi berbère libyen Shéshonq qui aurait également pris l’Arche de l’Alliance au cours de cette campagne militaire en Israël.
[vii] Cf. Allioui, Youcef. “ Histoire d’amour de Sheshonq 1er, Roi berbère et pharaon d’Egypte. Contes et comptines kabyles. Paris: L’Harmattan, 2013.
[viii] Cf. Rouighi, Ramzi. Inventing the Berbers History and Ideology in the Maghrib. Philadelphia, Pennsylvania: University of Pennsylvania Press, 2019.
[ix] https://www.upenn.edu/pennpress/book/15951.html
“Before the Arabs conquered northwest Africa in the seventh century, Ramzi Rouighi asserts, there were no Berbers. There were Moors (Mauri), Mauretanians, Africans, and many tribes and tribal federations such as the Leuathae or Musulami; and before the Arabs, no one thought that these groups shared a common ancestry, culture, or language. Certainly, there were groups considered barbarians by the Romans, but « Barbarian, » or its cognate, « Berber » was not an ethnonym, nor was it exclusive to North Africa. Yet today, it is common to see studies of the Christianization or Romanization of the Berbers, or of their resistance to foreign conquerors like the Carthaginians, Vandals, or Arabs. Archaeologists and linguists routinely describe proto-Berber groups and languages in even more ancient times, while biologists look for Berber DNA markers that go back thousands of years. Taking the pervasiveness of such anachronisms as a point of departure, Inventing the Berbers examines the emergence of the Berbers as a distinct category in early Arabic texts and probes the ways in which later Arabic sources, shaped by contemporary events, imagined the Berbers as a people and the Maghrib as their home. “
[x] Cf. Rouighi, Ramzi. “Race on the mind, “in Aeon du 19 septembre 2019. https://aeon.co/essays/how-the-west-made-arabs-and-berbers-into-races
[xi] Cf. https://www.ethnologue.com/world
[xii] Cf. Camps, Gabriel. “Les Numides et la civilisation punique, “ in Antiquités africaines, 14, 1979 : 43-53. https://www.persee.fr/doc/antaf_0066-4871_1979_num_14_1_1016
[xiii] Cf. HALIMI, Gisèle. La Kahina. Paris : Plon, 2006, réédition Pocket 2009.
Cf. aussi :
Ikor, Roger. La Kahina. Paris : Encre, 1979 ; et
Nebot, Didier. La Kahéna, reine d’Ifrikia. Paris : Ed Anne Carrière, 1998.
[xiv] Cf. Bououd, Ahmed. “L’expression du droit coutumier amazigh « azref » : perspective sociolinguistique. “
http://bououd.e-monsite.com/medias/files/azref-technolecte-juridique.pdf
“Le ljmaàt ou l’anfalis font partie des institutions qui ont toujours joué un rôle prépondérant dans le maintien des équilibres au sein de la société ; il désigne un mini-conseil composé des représentants des familles. Son rôle est de coordonner et contrôler les activités au sein du village. Il s’agit donc d’une institution traditionnelle administrative, sociale et économique. Il veille au bon fonctionnement des différentes structures et est juridiquement encadré par des lois coutumières azerf. Les membres de la tribu amazighe se réunissent afin de nommer les représentants de ce mini-conseil, appelé inflas ou ayt rbàin. Ils forment ainsi le tajmaàt n taqbilt (conseil de la tribu), un comité représentant la tribu, composé des amaghar : amghar d iyer, d’agdal, de tawiza et de tawala. “
[xv] Cf. Coon, Carleton S. The Tribes of the Rif. Harvard African Studies (Number 9). Cambridge: Peabody Museum of Harvard University, 1931.
[xvi] Cf. Bououd, Ahmed. “L’expression du droit coutumier amazigh « azref »: perspective sociolinguistique “op. cit. p. 3.
[xvii] Cf. Camps, G.; Claudot-Hawad, H.; Chaker, S.; and Abrous, D. “Écriture, “in Encyclpédie Berbère, 1996, Volume 17: 2564-2585. https://journals.openedition.org/encyclopedieberbere/2125
[xviii] Cf. Chtatou, Mohamed. “Comprendre la trinité culturelle amazighe, “ in Le Monde Amazigh du 7 septembre 2018. http://amadalamazigh.press.ma/fr/comprendre-la-trinite-culturelle-amazighe/
[xix] Cf. Chtatou, Mohamed. “The Jajouka Master Musicians: A Universal Hymn To Tolerance And Peace From Morocco To The World – Analysis, “in Eurasia Review of September 16, 2019. https://www.eurasiareview.com/16092019-the-jajouka-master-musicians-a-universal-hymn-to-tolerance-and-peace-from-morocco-to-the-world-analysis/
[xx] Cf. Chtatou, Mohamed. “Les femmes amazighes, gardiennes de la langue et de la culture, “ in Le Monde Amazigh de 29 avril 2020. http://amadalamazigh.press.ma/fr/les-femmes-amazighes-gardiennes-de-la-langue-et-de-la-culture/
[xxi] Cf. Virolle, Marie. “ Chapitre 6. Sacrifices et deuils en Kabylie. Réflexions sur quelques éléments d’un système sacrificiel, “ in Sacrifices en Islam. Espaces et temps d’un rituel, édité par Pierre Bonte, Anne-Marie Brisebarre, Altan Gokalp. Paris: CNRS Éditions, 1999: 177-195.
[xxii] Cf. Hart, Montgomery David. The Aith Waryaghar of the Moroccan Rif: An Ethnography and History. (Viking Fund Publications in Anthropology No. 55). Tucson: University of Arizona Press, for Wenner–Gren Foundation, 1976.
[xxiii] Cf. Chtatou, Mohamed. “Les femmes amazighes, gardiennes de la langue et de la culture, “ op. cit.
[xxiv] Cf. Rollinde, Marguerite. “Le mouvement amazighe au Maroc : défense d’une identité culturelle, revendication du droit des minorités ou alternative politique ? “, Insaniyat, 8, 1999 : 63-70. http://journals.openedition.org/insaniyat/8325
[xxv] Cf. Chtatou, Mohamed. “Les femmes amazighes, gardiennes de la langue et de la culture, “ op. cit.
[xxvi] Ibid.
[xxvii] Cf. https://www.refworld.org/country,,USDOS,,DZA,,47d92c5118,0.html
“Access to print and broadcast media for Amazigh culture continued to grow. Tamazight (the Amazigh or Berber language) programming also increased on the non-Berber language channels, as did advertisements in Tamazight on all television and radio channels. Beginning in the 2006-2007 scholastic year, the Tamazight language was officially taught in primary schools, starting in the fourth grade in 17 predominantly Berber provinces. “
Cf. aussi: https://2009-2017.state.gov/j/drl/rls/hrrpt/2007//index.htm
[xxviii] Cf. Waterbury, John. North for Trade: Life and Times of a Berber Merchant. Berkeley, CA: University of California Press, 1973.
“In this fascinating and immensely readable book the author seeks to outline some of the social and economic changes that have taken place in Morocco between the establishment of the French Protectorate and the present day. This he attempts to do by describing the traditional background and the personal experiences of an individual Berber, a grocer from the valley of the Sous in southern Morocco who, under the pseudonym of Hadj Brahim, is allowed to do a good deal of the talking himself. In a series of vivid and often amusing reminiscences he tells how he started work in his uncle’s shop in Tangier in 1925, fought against the French invaders of his native valley in 1934, set up his own grocery business in Casablanca in 1935, and how he lived through and actively participated in the series of events which finally led to Moroccan independence and the accelerated social and economic changes which were to follow. The method employed by the author is highly successful, resulting in a varied and stimulating account which will be of interest not only to students of the social sciences but to all those who concern themselves with North African affairs. “– James Bynon in http://www.jstor.org (Sep. 16, 2016).
“Dans ce livre fascinant et d’une grande lisibilité, l’auteur s’efforce d’exposer certains des changements sociaux et économiques qui ont eu lieu au Maroc entre l’établissement du protectorat français et aujourd’hui. Il tente de le faire en décrivant le contexte traditionnel et les expériences personnelles d’un Berbère, un épicier de la vallée du Sous, dans le sud du Maroc, qui, sous le pseudonyme de Hadj Brahim, est autorisé à parler lui-même en grande partie. Dans une série de souvenirs vifs et souvent amusants, il raconte comment il a commencé à travailler dans la boutique de son oncle à Tanger en 1925, a lutté contre les envahisseurs français de sa vallée natale en 1934, a créé sa propre épicerie à Casablanca en 1935, et comment il a vécu et participé activement à la série d’événements qui ont finalement conduit à l’indépendance du Maroc et aux changements sociaux et économiques accélérés qui allaient suivre. La méthode employée par l’auteur connaît un grand succès, ce qui donne lieu à un récit varié et stimulant qui intéressera non seulement les étudiants en sciences sociales mais aussi tous ceux qui s’intéressent aux affaires nord-africaines. “ — James Bynon dans http://www.jstor.org (16 septembre 2016).
[xxix] Cf. http://expertes.ma/skin/Constitution.pdf
Article 5 :
“L’arabe demeure la langue officielle de l’Etat.
L’Etat œuvre a la protection et au développement de la langue arabe, ainsi qu’à la promotion de son utilisation.
De même, l’amazighe constitue une langue officielle de 1’Etat, en tant que patrimoine commun de tous les Marocains sans exception.
Une loi organique définit le processus de mise en œuvre du caractère officiel de cette langue, ainsi que les modalités de son intégration dans l’enseignement et dans les domaines prioritaires de la vie publique, et ce afin de lui permettre de remplir à terme sa fonction de langue officielle. “ (Constitution du Royaume du Maroc adoptée le 1 juillet 2011.)
[xxx] Cf. Bouhjar, Aicha. “ De la langue du terroir à une langue au pouvoir : officialisation de la langue amazighe (berbère) au Maroc, “ in Lengas, 71, 2012 : 29-40. http://journals.openedition.org/lengas/343 ; DOI : https://doi.org/10.4000/lengas.343
[xxxi] Cf. Arrami, Stéphane. “La langue amazighe officialisée en Libye, “ in Amazigh24.com du 1 juin 2020. https://amazigh24.com/la-langue-amazighe-officialisee-en-libye/
[xxxii] Ibid.
[xxxiii] Ibid.
[xxxiv] Cf. Thiolay, Boris. “Mali : les Touaregs, un peuple dans la tourmente, “ in L’Express de 25 janvier 2013. https://www.lexpress.fr/actualite/monde/afrique/mali-les-touaregs-un-peuple-dans-la-tourmente_1213530.html
[xxxv] Cf. Chtatou, Mohamed. “ Le tapis amazigh : identité, création, art et histoire, “ in Le Monde Amazigh du 18 juin 2020. http://amadalamazigh.press.ma/fr/le-tapis-amazigh-identite-creation-art-et-histoire/
[xxxvi] Cf. Chtatou, Mohamed. “ La poésie, la chanson et la danse en tant que marqueurs forts de l’identité amazighe, “ in Akalpress du 1 juillet 2020. https://fr.akalpress.com/5284-la-poesie-la-chanson-et-la-danse-en-tant-que-marqueurs-forts-de-lidentite-amazighe/
[xxxvii] Cf. Elmedlaoui, Mohamed et Sigal Azaryahu. “The ‘‘Aḥwash’’ Berber singing ceremony shift from Morocco to Israel: An ethno-musicological Approach, “in Études et Documents Berbère, 33, 2014/1 :171-186.
[xxxviii] Cf. Laporte, J. P. “Mauvais œil, “in Encyclopédie berbère, 31, 2010; Online since 31 December 2015. URL: http://journals.openedition.org/encyclopedieberbere/534
[xxxix] Cf. Westermarck, Edward (Edvard). Ritual and Belief in Morocco. London : Macmillan, 2 vols, 1926.
Entre 1898 et 1926, Edward Westermarck a passé sept ans au Maroc, visitant des villes et des tribus dans différentes régions du pays, rencontrant les populations locales et apprenant leur langue et leur culture. Ses découvertes sont notées dans cet ensemble de deux volumes, publié pour la première fois en 1926. En plus de nombreux documents de référence, dont le système de translittération de Westermarck et une liste complète des tribus et des districts mentionnés dans le texte, les chapitres abordent des domaines tels que les influences et les relations entre la religion et la magie au Maroc, les origines des croyances et des pratiques, les malédictions et la sorcellerie. Il s’agit du premier volume d’une série de deux traitant du même sujet, et il fascinera tout étudiant ou chercheur en anthropologie qui s’intéresse à l’histoire des rituels, de la culture et de la religion au Maroc.
[xl] Cf. Rogers, Deborah. “Inequality: Why egalitarian societies died out, “in New Scientist du 25 juillet 2012. https://www.newscientist.com/article/dn22071-inequality-why-egalitarian-societies-died-out/
[xli] Ibid.
“FOR 5000 years, humans have grown accustomed to living in societies dominated by the privileged few. But it wasn’t always this way. For tens of thousands of years, egalitarian hunter-gatherer societies were widespread. And as a large body of anthropological research shows, long before we organised ourselves into hierarchies of wealth, social status and power, these groups rigorously enforced norms that prevented any individual or group from acquiring more status, authority or resources than others.
Decision-making was decentralised and leadership ad hoc; there weren’t any chiefs. There were sporadic hot-blooded fights between individuals, of course, but there was no organised conflict between groups. Nor were there strong notions of private property and therefore any need for territorial defence. These social norms affected gender roles as well; women were important producers and relatively empowered, and marriages were typically monogamous. “
[xlii] Cf. Chtatou, Mohamed. “Aspects du leadership et de la démocratie chez les Amazighs du Maroc, “ op. cit.
[xliii] Cf. Rollinde, Marguerite. “Le mouvement amazighe au Maroc : défense d’une identité culturelle, revendication du droit des minorités ou alternative politique ? “ op. cit.
[xliv] Cf. Glen, Johnson. “In post-Kadafi Libya, Berber minority faces identity crisis,“ in Los Angelos Time du 22 mars 2012. https://www.latimes.com/world/la-xpm-2012-mar-22-la-fg-libya-identity-20120323-story.html
“Zuhair’s struggle with her identity mirrors a broader quest in Libya as the country tries to recover from the four-decade rule of Moammar Kadafi, whose Arab nationalist regime long repressed minority cultures.
The 21-year-old is a member of the Amazigh, more commonly known as Berbers, who are experiencing a resurgence of their ancient culture. But the renaissance highlights contrasting aspirations in a post-Kadafi Libya where globalized youths such as Zuhair dream of greater autonomy while traditionalists and religious conservatives find comfort in more familiar strictures. “
[xlv] Cf. Tamazgha, organisation non gouvernementale de défense des droits des Imazighen (Berbères), « Les Berbères en Libye », Rapport alternatif de Tamazgha au Comité des droits économiques, sociaux et culturels, Nations Unies, Conseil économique et social, Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, 35e session du Comité des droits économiques sociaux et culturels, Genève, 7-25 novembre 2005. http://www.tamazgha.fr/IMG/pdf/Libye-Rapport-Tamazgha.pdf
[xlvi] Cf. Chapin Metz, Helen. Libya: a country study. Washington, D.C.: Federal Research Division, Library of Congress, 1989.
[xlvii] Cf. Desrues, Thierry. “Le surgissement de la cause amazighe en Libye : des espoirs de reconnaissance aux déconvenues de la realpolitik, “ in les revendications amazighes dans la tourmente des « printemps arabes », Mohand Tilmatine et Thierry Desrues (dir.). Rabat : Centre Jacques Berque, 2017 : 233-251. https://books.openedition.org/cjb/1367?lang=fr
[xlviii] Cf. https://www.makabylie.org/
[xlix] Cf. Gorzewski, . Andreas. “Conflict between Arabs and Berbers in Algeria: A social minefield, “in Qantara du 20 juillet 2015. https://en.qantara.de/content/conflict-between-arabs-and-berbers-in-algeria-a-social-minefield
[l] Cf. Chtatou, Mohamed. “Les femmes amazighes, gardiennes de la langue et de la culture, “ op. cit.
[li] Cf. Fanack.com. “Women in Berber Culture, “in Fanack.com of November 8, 2017 / March 24, 2020. https://fanack.com/morocco/society-media-culture/culture/berber-women/
“Women are valorized as keepers of Berber language and culture as central to identity construction. Identity construction and preservation through art is also at the heart of Berber women’s religious and spiritual agency. Through their artistic expressions, women not only control weddings as a means of preserving the sacredness of cultural distinctiveness in the midst of powerful societal influences, such as modernization, which are rapidly affecting their lives, but they also weave carpets, make tents and pottery, decorate face, hands and feet with henna and embroider clothing that reinforces Berber ethnic identity. Through art and mother-daughter transmission, Berber women link the past with the present. “
[lii] Ibid.
“Women are valorized as keepers of Berber language and culture as central to identity construction. Identity construction and preservation through art is also at the heart of Berber women’s religious and spiritual agency. Through their artistic expressions, women not only control weddings as a means of preserving the sacredness of cultural distinctiveness in the midst of powerful societal influences, such as modernization, which are rapidly affecting their lives, but they also weave carpets, make tents and pottery, decorate face, hands and feet with henna and embroider clothing that reinforces Berber ethnic identity. Through art and mother-daughter transmission, Berber women link the past with the present. “
[liii] Cf. Chtatou, Mohamed. “ Le tapis amazigh : identité, création, art et histoire, “ op. cit.
[liv] Cf. Sud Est Maroc. “L’art du tapis berbère, “ in Sud Est Maroc.com. du 14 novembre 2019. https://sudestmaroc.com/art-du-tapis-a-taznakhte-ouarzazate/
[lv] Cf. Saley, Maman. “Le cas du Niger : les touareg du passé au futur, “ in Civilisation 43-2, 1996 : 65-82. http://journals.openedition.org/civilisations/1568
[lvi] Cf. Maddy‐Weitzman, Bruce.“Contested identities: Berbers, ‘Berberism’ and the state in North Africa, “ in The Journal of North African Studies, 6:3, 20O1: 23-47. https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/13629380108718442?journalCode=fnas20
“The emergence of the Berber/Amazigh culture movement, in Morocco, Algeria and in the Berber diaspora poses important questions for North African regimes and societies as they enter the twenty‐first century. Moreover, it provides fertile ground for students of nationalism, collective memory and identity. The Berber experiences in Algeria and Morocco have been quite different from one another, and thus pose different sets of questions to the respective regimes, societies and Berber communities. None the less, these experiences have resulted in an increasing self‐consciousness among Berbers as Berbers in both places, which increasingly includes a more explicit political dimension. The Kabylian Amazigh coexist uneasily with state authorities within a situation of overall uncertainty as to the future nature of the State. The Moroccan case is more amorphous, and less overtly political, but is no less part of the new Berber ‘imagining’. The process of reshaping and redefining the meaning of Moroccan and Algerian collective identities has already begun and will surely be fraught with tension and difficulties. The way in which growing Berber collective self‐consciousness interacts with the Moroccan and Algerian states, and with other segments of their societies will do much to determine the future course of North African affairs. “
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Professeur universitaire et analyste politique international